On les appelle Junior & Senior
Après le cinéma, les inoubliables Terence Hill et Bud Spencer débarquent dans les rayons BD grâce à Robin Recht, Jean-Baptiste Hostache et Le Lombard. On l’appelait Trinita, maintenant on les appelle Junior et Senior, mais la chemise rose trouée et le manteau de fourrure orné d’une étoile de shériff sont toujours là. De quoi faire frémir plus d’un nostalgique de ces films décomplexés et jouissifs qui ont fait la joie de plus d’un vidéo club.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
Afin de se débarrasser de son concurrent à l’élection présidentielle américaine, le sénateur Smith veut révéler l’existence de Karina, la fille illégitime de celui-ci. Le politicien fait alors sortir de prison les piètres truands Junior et Senior qui devront kidnapper la jeune fille et la lui ramener. Les deux frères se mettent donc en route pour l’orphelinat, Senior par appât du gain alors que Junior espère surtout tomber sur une jolie orpheline à séduire. Hélas pour eux, rien ne va se passer comme prévu. Ils débarquent en effet dans une chambre qui abrite six gamines aussi déjantées que solidaires. Bien contentes de pouvoir prendre la poudre d’escampette, elles refusent de révéler laquelle d’entre elles est Karina, obligeant ainsi les deux intrus à toutes les emmener avec eux. C’est le début d’une folle course poursuite.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
Dieu pardonne… eux pas !
Terence Hill et Bud Spencer font partie intégrante de l’enfance de l’auteur de cette chronique, ainsi que de celle de la grande majorité de sa génération et de celles autour : les enfants nés de la fin des années 1960 au début des années 1980. Des millions de personnes à travers le monde qui ont savouré chaque rediffusion des films des deux acteurs et littéralement poncé leurs VHS. Nés en Italie, de leurs véritables noms respectifs Mario Girotti et Carlo Pedersoli, le duo italien a partagé l’affiche sur dix-huit films entre 1967 et 1985. Mêlant comédie et, au choix, western, polar, aventures ou action, leur duo fonctionnait sur une dynamique identique. Le personnage de Terence Hill, belle gueule, séducteur, malin et rapide, faisait équipe, de gré ou de force, avec celui de Bud Spencer, cogneur bourru et bougon au grand cœur, courageux et déterminé à rendre justice.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
C’est exactement cette même relation qui lie les frangins Junior et Senior dans le scénario de Robin Recht, ce qui ravira chaque fan de Terence Hill et Bud Spencer. On retrouve, en effet, dans On les appelle Junior et Senior, tout ce qui faisait le charme des films du duo : une action qui ne s’arrête que pour laisser place à de la comédie burlesque, pas très recherchée mais diablement efficace. Inutile de dire qu’on rigole beaucoup à la lecture, notamment grâce aux dialogues hilarants, riches en punchlines et aux nombreux gags de répétition. Mais l’ajout et l’atout comiques de Robin Recht résident dans les six fillettes, compétemment déjantées. Bien que la petite madame-je-sais-tout et la voleuse de flingue tirent leur épingle du jeu, c’est bien leur relation et leur complicité qui offrent un succulent contrepoids face au duo de truands qui les accompagnent.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
Même les anges mangent des fayots
Si le titre de l’album, faisant référence à l’un des films les plus célèbres du duo, On l’appelle Trinita, ne suffisait pas, la première planche annonce directement la couleur : l’album sera un hommage ultra référencé. En effet, dans la première case, un politicien clame « Qui, mieux que moi, peut vous comprendre ? » avant de s’auto-répondre « Personne ! ». Le Personne de Mon nom est Personne ? En tous cas, Mamita et ses haricots au lard sont bien là ! La suite est un florilège d’allusions : le surnom « Bambino » qui met en colère Senior comme le rôle de Bud dans On l’appelle Trinita, la récurrente posture préférée de Junior, allongé les mains sur le ventre et le chapeau sur le visage, des allusions à certains titres de films comme la Colline des bottes, Vertiges pour un tueur et bien sûr, Petit Papa Baston. Tous ces clins d’œil fonctionnent à la perfection et il n’y a que l’apparition de deux figurants nommés Bud et Terence qui fait un peu forcée et évitable.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
D’autres références se glissent également dans l’album. Ainsi les politiciens qui s’opposent ont respectivement pour nom Smith et Wesson, comme le célèbre fabriquant d’armes américain. Smith, d’ailleurs, clamera dès la première planche un trumpien « Ensemble nous ferons à nouveau une grande Amérique ! » Plus tard, il fait allusion à Roy Bean, un patron de saloon réel qui a eu la particularité de s’auto proclamé juge et de mener ses procès directement dans son estaminet. Une double référence puisque « bean » signifie haricot en anglais, l’élément exclusif des repas des personnages de Terence et Bud dans leurs westerns. On trouve aussi quelques clins d’œil, entre autres, à Mizazaki et notamment à son mythique générique de Sherlock Holmes.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
Qui trouve des amis trouve un trésor
Il n’y a toutefois pas que des gags et des références dans On les appelle Junior et Senior. L’intrigue, bien que classique, se révèle captivante, non seulement grâce à son rythme effréné mais aussi par ses nombreux rebondissements et, surtout, par les touches régulières d’émotion que le scénario distille, notamment grâce aux fillettes qui ne sont pas que des furies déchaînées. Robin Recht leur offre en effet quelques scènes où elles peuvent parler de leur condition d’orpheline et fait naître, entre elles et le duo de malfrats, une complicité très touchante. Cette dualité entre humour potache et tendresse se retrouve dans le dessin de Jean-Baptiste Hostache.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
En dehors de sa participation à un tome de la série Vie de Merde, le dessinateur est plus un habitué d’un style réaliste et historique. Dans On les appelle Junior et Senior, il démontre un réel talent pour des personnages plus caricaturaux. Terence Hill et Bud Spencer sont parfaitement représentés alors que les fillettes ou les nombreux personnages secondaires rivalisent de bonnes tronches bien expressives. Mention spéciale pour la Fraulein Bismarck, la bien nommée surveillante de l’orphelinat qui se lance à la poursuite des fuyards. Les décors, dans un style croqué, et les couleurs plutôt douces des planches participent pleinement à la grande réussite graphique de l’album.

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
On les appelle Junior et Senior est un magnifique hommage au cinéma de Terence Hill et Bud Spencer, bourré de références, plus ou moins subtiles mais presque toujours jouissives, à leurs films, mais aussi au cultissime Mon nom est Personne avec Hill mais sans Spencer. Mais loin de n’être qu’une suite de clin d’œil, l’album allie humour action et émotion dans un album qui pourra plaire à toutes les générations : l’humour gaguesque est très accessible à partir de 8 ans et les dessins suffisamment expressifs pour convaincre enfants comme adultes. Espérons un succès commercial pour peut-être retrouver les frangins cogneurs dans une prochaine aventure !

© On les appelle Junior & Senior – Recht/Hostache – Le Lombard, 2025
Une chronique écrite par : Cédric « Sedh » Sicard
Informations sur l’album :
- Scénario : Robin Recht
- Dessin : Jean-Baptiste Hostache
- Couleurs : Jean-Baptiste Hostache
- Éditeur : Le Lombard
- Date de sortie : Le 12 septembre 2025
- Pagination : 104 pages en couleurs