Ces dernières années, il semble devenu coutumier de voir en librairie des œuvres, en one shot ou séries courtes, dont les intrigues mêlent faits et personnages historiques avec des enjeux fictifs. Les Indes Fourbes, 1629, l’Ombre des Lumières, entre autres, font partie de ces sorties d’albums luxueux. C’est également le cas du premier tome du diptyque l’Ogre de Jean Dufaux et Juan Luis Landa.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

En 1427, le royaume de France est tiraillé entre deux souverains qui clament, chacun, leur légitimité à régner : l’anglais Henri VI qui contrôle une grande partie du nord du pays, et Charles VII, fils de Charles VI le fou, qui a du mal à affirmer son autorité. C’est la Guerre de Cent Ans. Le territoire français est alors le théâtre de nombreuses rixes, de sièges, mais aussi de groupes de truands semant la terreur dans les campagnes. Au sein de l’une d’elle, la Bande à Colin Frappe-Misère, sévit un homme aussi repoussant que puissant et impitoyable. Surnommé l’Ogre, à cause de son physique mais aussi par son habitude de dévorer une partie de ses victimes, généralement des fillettes. Alors que le capitaine Guillaume de Blamont est chargé de retrouver ce « monstre », une jeune vierge fait son apparition : celle qu’on connaîtra bientôt sous le nom de Jeanne d’Arc.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

La belle et la bête

Complainte des Landes Perdues, Murena, Barracuda, le Bois des Vierges, et tant d’autres œuvres, l’amour et le talent de Jean Dufaux pour les fictions historiques, avec ou sans fantastique, ne sont plus à prouver. À la façon d’un Alexandre Dumas, le scénariste prouve encore une fois avec l’Ogre qu’il est capable de mêler la grande Histoire avec les petites histoires de nombreux personnages, et cela sans jamais perdre le lecteur. Parce qu’il faut bien reconnaître que ce premier tome est très riche en sous-intrigues, qu’elles soient politiques, amoureuses ou juste intimes. Chacune de ces sous-récits n’en demeure pas moins parfaitement maîtrisé et passionnant.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

L’Ogre, personnage titre, est plus un enjeu pour l’intrigue plus que son réel protagoniste, rôle qui semble plus convenir à Guillaume de Blamont ou, plus tardivement, la future Jeanne d’Arc. Loin de l’image de candide paysanne qui semblerait plus coller à l’Histoire, Jean Dufaux, choisit d’en faire une figure sensuelle. Une nouvelle version pour ce personnage déjà représenté sous tant de visages aux symbolisme différents, de la pureté d’une Ingrid Bergman à l’hystérique Milla Jovovitch… Ce choix, étonnant de prime abord, prend tous son sens lorsque Jeanne rencontre l’Ogre. Telle Esmeralda envers Quasimodo ou la Belle pour la Bête, la jeune femme voit au-delà de l’apparence et est même la seule à vouloir connaître le prénom de l’ogre, Jaco. Cette complicité, comme l’annonce la fin de l’album, sera très certainement déterminante dans la fin du diptyque.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

Icone & icones

Bien que ce soit sa première collaboration avec Jean Dufaux, ce n’est pas une réelle surprise de trouver Juan Luis Landa au dessin de l’Ogre. Le Basque n’a, en effet plus rien à prouver dans l’illustration de bandes-dessinées historiques, et notamment médiévales, puisqu’on lui doit les séries, Arthus Trivium chez Dargaud et les Chroniques de Ronceveaux chez Glénat. Il tire de ces précédentes expériences une grande aisance dans les scènes de bataille comme le montre l’iconique couverture de l’album (les deux tomes formeront d’ailleurs une image unique). Toujours lisibles, même de nuit, les moments d’action sont ultra dynamiques et généreux dans leur nombreux figurants et détails.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

L’illustrateur propose un dessin de personnages très classique mais des plus efficaces. Les personnages historiques, en dehors de Jeanne, sont plutôt proches de leurs modèles mais avec un aspect moderne très réussi. L’ogre Jaco, est également d’une grande force visuelle, que ce soit dans son visage déformé ou dans la dynamique de ses mouvements, renforçant la menace d’animal sauvage qu’il représente. Les décors sont somptueux, et la colorisation assurée par Juan Luis Landa rend honneur à son dessin, notamment dans la beauté de la campagne ou lors de scènes nocturnes parfaitement maîtrisées.

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© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

Malgré une très grande présence de narration, le rythme de ce premier tome est relativement soutenu. Sans jamais se perdre dans les informations historiques ou les sous intrigues, Jean Dufaux parvient même à rendre ses personnages crédibles, qu’ils soient attachants ou repoussants. Avec sa couverture luxueuse et iconique, et sa taille généreuse, l’Ogre est à a fois un bel objet et une œuvre captivante, servie par un dessin classique mais vraiment riche et agréable.

Une chronique écrite par : Cédric « Sedh » Sicard

© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

Informations sur l’album :

  • Scénario : Jean Dufaux
  • Dessin : Juan Luis Landa
  • Couleurs : Juan Luis Landa
  • Éditeur : Glénat
  • Date de sortie : Le 24 septembre 2025
  • Pagination : 112 pages en couleurs

© L’Ogre, acte 1 – Dufaux/Landa – Glénat, 2025

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