Le Pilote à l’aile brisée – T1 de Buck Danny Origines
Les héros vivent plusieurs vies en une. Buck Danny en est le parfait exemple, car le voilà de retour dans une autre série dérivée, enrichissant encore la saga débutée en 1947. En plus de ses aventures narrées dans la série principale, de celles de « Buck Danny Classics » se passant dans les années 50, et des « One Shot » occasionnels, l’aviateur à l’impeccable chevelure blonde est dorénavant le personnage principal de « Buck Danny Origines » dont l’action se situe pendant la seconde guerre mondiale.
Entre ses exploits à Midway, ses folles batailles contre les fameux « Japs » dans le Pacifique et son enrôlement dans les fameux « Tigres Volants » en Asie, on savait, à la lecture des premiers albums de la série principale que Buck Danny, brillant aviateur américain, n’avait pas chômé entre 1941 et 1945. C’était sous-estimer le vaillant militaire ! Dans ce premier tome de cette nouvelle série, on va voir que le pilote avait d’autres aventures à son crédit, tout en apprenant un peu plus à connaitre son enfance.
Nous retrouvons donc notre héros, en permission, quelque part entre les tomes 2 et 3 de la série principale, rendant visite à sa famille. Celui qui n’est alors « que » capitaine de l’U.S. Air Force apprend alors brutalement le décès de son père, et tente de réconforter sa mère, prototype de la femme courageuse, tout en racontant ses faits d’armes à son jeune frère « Microbe », avide de récit d’aventures… Celles-ci reviennent cependant bien vite dans la vie de Buck, qui, abattu lors d’un combat, se retrouve isolé sur un canot de fortune dans l’océan. En proie au délire, se remémorant son enfance, il devra pourtant puiser dans ses ressources de courage (apparemment inépuisables), car un sous-marin ennemi aux desseins guerriers et vengeurs rôde dans les environs…
À la manière d’un Blueberry connaissant de multiples séries annexes, Buck Danny a donc dorénavant sa collection « Origines » supposée nous montrer comment le personnage est devenu ce qu’il est, à savoir un militaire vaillant, patriote, talentueux, courageux (et bien coiffé). La première histoire de cette nouveauté, « Le pilote à l’aile brisée », prévue en deux volumes, est une fiction de guerre dans laquelle l’aviateur va se remémorer sa jeunesse difficile dans une famille touchée de plein fouet par la grande dépression. Évitant les pièges d’une annexe type « La Jeunesse de Buck Danny », le scénariste Yann propose pour cela des flash-backs indépendants de la trame principale du récit, sans que cela ne nuise à un ensemble de facture ultra classique. Si la forme s’insère parfaitement dans les habitudes de la série (ou plutôt « franchise » maintenant) créée par Hubinon et Charlier – schémas tactiques et explications techniques en fin de page, langage militaire et guerrier – une certaine modernité bienvenue allège le tout, comme l’absence de narratifs ou la présence d’une certaine dose de sentimentalité adossée à l’action. En revanche, on peut, même en étant néophyte, remarquer certaines erreurs surprenantes de documentation, notamment sur le drapeau américain, qui, à l’époque, n’avait que 48 et non 50 étoiles… Le scénario reste cependant celui d’une histoire de guerre tout à fait traditionnelle, à l’image des premiers tomes de la série où l’aspect dramatique des choses n’était pas encore compensé par un certain humour, propre à Sonny Tuckson que Buck n’avait pas encore rencontré.
Le dessin net et précis de De Luca, respectueux de la légende, est propre et lisible. Sans atteindre la maîtrise d’un Hubinon ou d’un Bergèse, le trait est assuré, et la couverture est simple, efficace et tout à fait alléchante. Les couleurs de guerre ocres, brunes, jaune donnent un aspect inquiétant bienvenue à la BD qui y gagne ainsi une ambiance de fin de monde imminente.
Finalement, ce premier tome de « Buck Danny Origines » présente une fiction de guerre bien faite dont la lecture est agréable. Toutefois, plutôt qu’une réelle invention ou un renouvellement, cette aventure est davantage un partage de passion des récits d’aviation par un scénariste fan de ce type d’histoires. La collection est donc dispensable, et n’apporte que peu à l’épopée déjà longue d’un personnage iconique, mais gageons que tous les amateurs de Buck Danny sauront malgré tout apprécier cette BD d’une facture aussi traditionnelle que son héros de papier.
Chronique écrite par Mathieu DEPIT
Informations sur l’album
- Scénario : Yann
- Dessin : Giuseppe De Luca
- Couleurs : Ketty Formaggio et Valeria Tenaga Romanazzi
- Éditeur : Dupuis « Grand public »
- Date de sortie : 28 janvier 2022
- Pagination : 48 en couleurs
- Format : 240 x320
