Rétro – Le Mystère Violaine – T4 de Jojo

L’enfance est un monde à part. Etonnant et empli de merveilleux, il permet d’étirer le temps et transforme chaque instant en une folle aventure. Tour à tour magique, enchanteur ou cruel, le traverser nous fait passer par toutes sortes d’émotions qui se succèdent à une vitesse folle. On y passe de la joie la plus démonstrative au chagrin le plus triste sans préavis, mais toujours de la façon la plus sincère qui soit. Ce monde fabuleux est décrit avec justesse par le regretté Geerts dans sa série « Jojo » et plus précisément dans l’album Le Mystère Violaine.

Couverture de Le Mystère Violaine
© Jojo – André Geerts – Dupuis

« Le mystère Violaine » est le quatrième tome de cette collection publiée dans Spirou de 1987 à 2010. Dans cet opus datant de 1991, on y suit le petit Jojo, son meilleur ami Gros-Louis et le reste de la classe tout au long d’une année scolaire un peu spéciale. Celle-ci commence en effet d’une façon mouvementée pour Jojo qui, pour la première fois, obtient l’autorisation d’aller à l’école à vélo plutôt qu’en prenant le bus, comme le reste de ses camarades. Si, pour le premier trajet rien ne se passe comme prévu, il arrive après la sonnerie et se fait punir, la vie est rapidement plus belle au guidon de sa bicyclette (surnommée « Rapide ») pour le petit garçon qui va rapidement être le plus ponctuel des élèves dans cette école où on ne plaisante pas avec les retards.

Planche 1 de Le Mystère Violaine
© Jojo – André Geerts – Dupuis

Un autre évènement marque toutefois la vie de la classe : l’arrivée de Violaine, une nouvelle élève. Complètement ignorée de ses camarades, la petite fille connait des premiers temps difficiles et passe ses récréations seule, aucun enfant ne faisant l’effort de lui parler. Toutefois, à la fin de l’automne, Violaine devient la coqueluche des autres, celle avec qui il faut être et se montrer. Tout le monde semble avoir changé d’attitude envers la nouvelle, sauf Jojo qui ne comprend pas d’où vient le phénomène. Quel est ce mystère ? Y a-t-il un lien entre la popularité de Violaine et la multitude de retards non sanctionnés ?

Planche 2 de Le Mystère Violaine
© Jojo – André Geerts – Dupuis

Tout au long de cet épisode, Geerts nous fait entrer dans l’enfance et la vie des élèves de la petite école de Jojo. En spectateur, avec pudeur et sans jugement, le talentueux auteur restitue encore une fois chaque tranche de vie d’un enfant de primaire avec justesse et sans fioriture superflue. On y retrouve évidemment le personnage titre de la série, gentil mais colérique, dont la vie est centrée sur son vélo et sur les tartines de confiture de sa mamy, mais aussi la vie quotidienne d’une école primaire à travers la vie des adultes qui la font fonctionner.

Planche 3 de Le Mystère Violaine
© Jojo – André Geerts – Dupuis

Si cet épisode nous montre quelques scènes de clichés gentiment exagérés, comme la maniaquerie poussée à l’extrême du directeur de l’école, il nous fait vivre, dans son intrigue principale d’autres moments plus difficiles et délicats. On partage ainsi les difficultés d’intégration de Violaine, la nouvelle élève. Geerts arrive à faire ressentir la mélancolie de la petite fille, poussée à la solitude par son arrivée venant perturber l’ordre des choses établi, mais aussi car elle est différente et a un gros nez, sujet de moquerie. « Le mystère Violaine » expose aussi toute la complexité des enfants, tour à tour durs, calculateurs et sympathiques par intérêt, avant de montrer une gentillesse énorme et une solidarité sans faille.

Planche 4 de Le Mystère Violaine
© Jojo – André Geerts – Dupuis

Le dessin, précis, harmonieux et ultra lisible de Geerts est à l’image du scénario qu’il a écrit : tendre, poétique et fort. Dans un style semi-réaliste de la plus pure tradition de l’école de Marcinelle, l’auteur arrive à n’oublier aucun détail, aucune expression de ses personnages, que ce soit Jojo, dont l’humeur est traduite par les mouvements de sa casquette béret, ou bien le directeur, aux sourcils si particuliers.

Planche 5 du tome 4 de Jojo
© Jojo – André Geerts – Dupuis

On dévore « Le mystère Violaine » plus qu’on ne le lit. Cette BD à l’intrigue presque minimaliste, sans suspens se parcourt pourtant d’une traite, le lecteur allant d’une page à l’autre avec envie. Album pouvant être lu par les enfants, plutôt qu’album pour enfant, il nous touche, nous émeut, nous fait sourire et rappelle des souvenirs universels, que chacun garde ancrés dans son cœur. Cet album, c’est la vie.

Chronique écrite par Mathieu DEPIT

Informations sur l’album

  • Scénario : André Geerts
  • Dessin : André Geerts
  • Éditeur : Dupuis « Tous publics »
  • Date de sortie : 2 octobre 1991
  • Pagination : 48 en couleurs
  • Format : 218 x 300

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