Le Dernier Témoin d’Oradour-sur-Glane – L’Histoire vraie de Robert Hébras
Il est impossible de hiérarchiser les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, La tragédie d’Oradour-sur-Glane fut le plus grand massacre de civil en France par les soldats de la Waffen-SS. Dans son livre, Agathe Hébras donnait la parole à son Grand-père, Robert, l’un des 6 survivants de ce drame. Avec Le Dernier Témoin d’Oradour-sur-Glane, Arnaud Delalande et Laurent Bidot l’adaptent en BD afin de contribuer à ce que ce rare témoignage ne tombe jamais dans l’oubli.
De nos jours. Agathe Hébras et son Grand-père Robert se « promènent » dans le village martyr d’Oradour-sur-Glane. Ce dernier vécut l’enfer le 10 juin 1944 lorsque la 2e division blindée Das Reich et ses 120 soldats Waffen-SS pénétrèrent dans le bourg. Robert Hébras avait 19 ans en 1944. En 2021, il était surtout la dernière personne à pouvoir encore témoigner.
Ce sont les parents de Robert qui sont venus s’installer à Oradour-sur-Glane, en 1925. Son père était électricien, sa mère travaillait aux champs Le vieux monsieur raconte à sa petite-fille les jours plutôt heureux et insouciants de son enfance et de son adolescence, malgré la guerre. « Jusque-là, on avait été bien épargnés. Et puis voilà, c’est arrivé, ma chérie… l’aube du samedi 10 juin 1944 est arrivée. » En quelques minutes, le village est encerclé par les SS et l’ensemble de la population est regroupée. Le massacre programmé en haut lieu est en marche…
S’extraire de l’enfer
L’histoire du village martyr d’Oradour-sur-Glane est encore dans toutes les mémoires… Mais pour encore combien de temps ? Les années passent. En 2024, le 80ème anniversaire du débarquement et de la bataille de Normandie à été commémoré. Les derniers témoins disparaissent les uns après les autres. Jusqu’à son décès en 2023, Robert Hébras n’aura eu de cesse de porter la parole d’une histoire qui aura marqué profondément sa chair et son âme : il est miraculeusement sorti vivant de la grange dans laquelle il était enfermé avec des dizaines d’autres hommes. Les SS les ont mitraillés avant de bouter le feu au bâtiment. Couché parmi les cadavres, le jeune Robert parvient à s’extraire de l’enfer avec 5 compagnons. Au nom des 643 victimes du massacre, il témoignera sans relâche aussi bien lors de procès, qu’auprès des écoles pour sensibiliser et ne jamais oublier. Il confiera son récit à sa petite fille Agathe Hébras avec laquelle il écrira le livre Le dernier témoin d’Oradour-sur-Glane en compagnie de la journaliste Mélissa Boufigi.
C’est donc cet ouvrage qui a été adapté en bande dessinée par le scénariste Arnaud Delalande. Il y mêle habilement séquences contemporaines – le dialogue continue entre Agathe et Robert – et les souvenirs du vieux monsieur qui plongent les lectrices et les lecteurs dans ces jours sombres de 1944.
Robert, François et Joachim
Au dessin, Laurent Bidot jongle ainsi entre les séquences du passé et celles du présent. Parfois, le grand-père et sa petite-fille se retrouvent ainsi spectateurs des scènes vécues par Robert, complètement immergés dans l’horreur de l’action. D’autres fois, ce sont les fantômes du passé qui s’affichent dans les scènes du présent. Le cartouche narratif du témoignage de Robert complète les séquences de flashback et les dialogues des protagonistes qui retracent les événements du 10 juin 1944, puis du reste de la vie de Robert Hébras, jusqu’à la visite du site qu’il fit en 2013, en compagnie du président français François Hollande et du président allemand Joachim Gauck.
Les traits et les couleurs de la bande dessinée sont sombres et durs à l’image d’une histoire qui ne censure aucun passage difficile et surtout pas l’exécution des civils, que cela soit celle hommes dans la grange ou celle des femmes et des enfants dans l’église du village.
Au-delà du récit et des images, les lectrices et les lecteurs ne sont pas embarqués dans une histoire de fiction, mais bien dans un récit ancré dans le réel et dans un témoignage dont il convient d’assurer la transmission aux générations futures. D’ailleurs l’ouvrage est complété par un dossier pédagogique rédigé par Agathe Hébras qui exprime justement cette conviction : « Pour penser à l’avenir, il ne faut rien oublier du passé.»
Chronique écrite par Bruce RENNES.
Informations sur l’album
- Scénario : Laurent Bidot
- Dessin : Arnaud Delalande
- Couleurs : Marie-Odile Galopin
- Éditeur : Harper Collins BD
- Date de sortie : 29 mai 2024
- Pagination : 96 en couleurs
