L’Âme des pilotes – T2 de Michel Vaillant Légendes

Un champion dans la tourmente, une piste mythique, une journaliste qui investigue, des bandits américains et le FBI à la rescousse sur la « French Riviera ». Le cadre est là, propice à l’aventure, la vraie, celle dont Michel Vaillant et Steve Warson ont l’habitude. Mais pour naviguer dans ces péripéties, le pilote le plus célèbre de la bande dessinée devra surmonter ses doutes et confier l’unique obsession qui trotte dans l’âme des pilotes.

Couverture de L’Âme des pilotes — Couverture de l’album L’Âme des pilotes © Michel Vaillant Légendes – Vincent Dutreuil et Denis Lapière – Dupuis

Au moment où débute cette nouvelle histoire, l’écurie Vaillante est en crise. Son pilote phare, Michel Vaillant, n’a pas inscrit le moindre point au championnat du monde des conducteurs 1971 de Formule 1, ni à celui des constructeurs en voiture de sport. Le grand prix de Monaco est donc abordé avec une certaine attention par l’équipe, d’autant plus que Michel est en proie au doute, lui qui connaît une série noire inhabituelle. Ces doutes, la journaliste Francine Seik les ressent lorsqu’elle interroge le champion dans sa suite de l’hôtel Hermitage de Monte Carlo et cherche à fouiller davantage la personnalité de Michel, lui qui se livre si peu. Pendant ce temps, Steve Warson est, lui, en pleine forme, mais voit son weekend de course compromis par un coup de fil qu’il n’aurait pu soupçonner. Ses amitiés et son passé récent se rappellent à lui, sur cette Côte d’Azur du début des 70’s, terrain de la fameuse « French Connection ». Quel jeu joue le pilote américain ? Michel Vaillant va-t-il sortir de sa mauvaise passe ? La team Vaillante a bien des crises à gérer pour son printemps monégasque.

Page 3 de L’Âme des pilotes — © Michel Vaillant Légendes – Vincent Dutreuil et Denis Lapière – Dupuis

Un héros qui parle de sa vocation

Après avoir décrit les fameuses 500 miles d’Indianapolis dans le premier tome de cette série dérivée de Michel Vaillant, les auteurs nous emmènent cette fois-ci sur le circuit de Monaco, temple de la vitesse et du glamour, à une période où les paddocks et le sport automobile étaient plus ouverts et abordables qu’aujourd’hui, apportant un aspect romantique et chevaleresque aux pilotes, ces gladiateurs modernes. Si l’amateur avisé de Formule 1 lie ce grand prix de Monaco 1971 au film « Weekend of a champion » où le réalisateur Roman Polanski suit le champion écossais Jackie Stewart, ce point est évoqué de façon minimale par le scénariste Denis Lapière, qui choisit de prendre Michel Vaillant lui-même pour apporter une dimension et une ambiance prenantes à son histoire. Tout en conservant les pages nécessaires à expliquer le déroulement du grand prix, il utilise une part non négligeable de l’album pour permettre à son héros de décrire avec passion ce qui n’est pas un métier, mais une vocation et un sacerdoce : être un pilote de course. Loin des stéréotypes de la machine à gagner auquel on l’associe souvent, Michel va, tout au long de l’album, montrer une facette de lui-même assez méconnue, tout à fait dans le climat de l’époque en Formule 1, mais aussi dans celui de la collection « Michel Vaillant ». Car la vraie bonne surprise de l’album est qu’il s’insère parfaitement dans la série mère en reprenant des éléments de différentes BD mythiques de Jean Graton.

Page 4 de L’Âme des pilotes — © Michel Vaillant Légendes – Vincent Dutreuil et Denis Lapière – Dupuis

Un hommage à la légende

« L’âme des pilotes » s’intègre en effet dans l’album « Série Noire », prépublié en 1971 et 1972 dans le journal Tintin. Le dessinateur Vincent Dutreuil indique d’ailleurs, dès la page de garde, s’être inspiré de certaines cases de l’album de Graton pour les répartir ici. Le fan de « Michel Vaillant » les retrouvera avec plaisir car Dutreuil les reproduit dans son propre style, fin et soigné, mais différent de celui du maître, plutôt que de tenter une imitation impossible. Cette idée, au premier abord assez saugrenue, s’avère finalement réussie, et le lecteur fidèle est ainsi ramené à de bons souvenirs tandis que les néophytes pourront profiter de jolies cases de bande dessinée. Si le scénario intègre un aspect policier assez dispensable, il permet, tout en apportant une ambiance de l’époque, de faire un lien avec une autre aventure, « Le retour de Steve Warson » et à Dutreuil de mettre en images certaines scènes d’action et un agent du FBI à l’allure du Delon du « Cercle rouge »… A noter les très belles scènes de pluie du dessinateur et les couleurs, tour à tour solaires ou froides d’Isabelle Charly, donnant encore plus d’ambiance à l’album. N’oublions pas non plus un bel invité sur le podium du grand prix, en cette année où il aurait fêté son centenaire, les aficionados le reconnaîtront !

Page 5 de L’Âme des pilotes — © Michel Vaillant Légendes – Vincent Dutreuil et Denis Lapière – Dupuis

« L’âme des pilotes » permet aux auteurs de rendre un bel hommage à la série Michel Vaillant elle-même, pour le bonheur des lecteurs de toujours. Lapière et Dutreuil le font en gardant leur style propre dans une BD où l’atmosphère supplante l’action proprement dite, ce qui rend la lecture agréable. Une BD avec un grand prix, des paroles d’hommes, des voitures, des paysages, des doutes et une moralité. Un Michel Vaillant, en somme !