La Guerre olympique – T2 de SuperGroom

Yoann et Vehlmann remettent le couvert avec leur déclinaison toute personnelle de l’univers de Spirou, sous la forme d’un superhéros malgré lui foutraque et déjanté. Quoi qu’on en pense, le résultat vaut le détour, entre parodie acide des comics américains et déconstruction du mythe Marcinellois.

Couverture de La Guerre olympique
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

Comme tout ce qui touche (ou ceux qui touchent) à un mythe établi comme Spirou et Fantasio, Supergroom, Fabien Vehlmann et Yoann ne laissent pas indifférents les amateurs du célèbre calot rouge. Renouvellement bienvenu pour les plus bienveillants, sacrilège pour les autoproclamés gardiens du temple, Supergroom peut raisonnablement (et consensuellement) être considéré comme quelque part entre les deux : une déclinaison audacieuse qui se veut avant tout une parodie des super-héros américains.

Planche 1 de La Guerre olympique
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

À la fin du tome 1, nous avions laissé Spirou résigné à devoir continuer sa tâche de justicier de quartier, sorte de Friendly Neighborhood Spidergroom ne pouvant plus s’extirper de l’engrenage dans lequel il s’est lui-même fourré. Nous avions également appris l’existence d’une société secrète fort intéressée par le potentiel de Supergroom dans le cadre de l’organisation d’une mystérieuse WOW – World Olympic War… Nous y voilà en plein au début de ce deuxième volume : Spirou est enlevé et parachuté sur une île, contraint d’affronter une pléiade de superhéros plus fantaisiste ou dangereux les uns que les autres, dans un Squid Game impitoyable… jusqu’à ce qu’il découvre qu’il a été envoyé là pour empêcher le plus diabolique d’entre eux, un robot terrifiant répondant au doux nom de « Chapeau Noir » (coucou André !), de gagner le premier prix, une somme d’argent mirifique dont il ferait forcément mauvais usage.

Planche 2 de La Guerre olympique
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

L’analogie volontaire avec Squid Game illustre la malchance de Fabien Vehlmann, scénariste au demeurant souvent inspiré, de fournir ce scénario au moment où les déclinaisons de Battle Royale ou de Hunger Games poussent comme du chiendent dans tout le paysage audio-visuel. L’effet de surprise sera donc considérablement réduit pour ceux ayant binge watché du Netflix pendant ces dernières semaines, malgré les qualités indéniables (et aussi les défauts) de cette « guerre olympique ».

Planche 3 de La Guerre olympique
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

Fort heureusement, Vehlmann ne se contente pas de nous infliger les épreuves successives de cette compétition sans y ajouter quelques tiroirs de scénario supplémentaires et quelques rebondissements. À partir du moment où les incohérences inhérentes au concept (comment peut-on imaginer que même Fantasio ne devine pas l’identité de ce superhéros à calot, écureuil et Fantacoptère ?…) sont avalées une bonne fois pour toutes, l’univers foutraque fonctionne à plein, même si la fantaisie du premier tome s’estompe pour laisser progressivement plus de place à un premier degré plus ou moins assumé.

Planche 4 de La Guerre olympique
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

À l’avenant est le dessin un peu brut, peu subtil et pas forcément rigoureux de Yoann, qui y gagne incontestablement en expressivité et en dynamisme. On peut déplorer, malgré toute la bienveillance du monde, un Spirou ensanglanté, grimaçant et assez disgracieux en couverture, qui ne donne pas franchement envie d’ouvrir le bouquin. Ce qui serait néanmoins un tort.

Planche 5 du tome 2 de SuperGroom
© SuperGroom – Fabien Vehlmann et Yoann – Dupuis

Alors que Spirou et Fantasio s’apprêtent à être adoptés par une nouvelle équipe d’auteurs, cette vie parallèle de notre groom a le mérite d’élargir son univers et de tester sa compatibilité au genre parodique. Que les grands héros classiques franco-belges viennent taquiner gentiment le monde des comics, ce n’est pas la première fois ; mais le moins qu’on puisse dire est que les prédécesseurs l’ont fait avec beaucoup moins de bonheur et de réussite.

Chronique écrite par Philippe BARRE

Informations sur l’album

  • Scénario : Fabien Vehlmann
  • Dessin : Yoann
  • Couleurs : Fabien Alquier
  • Éditeur : Dupuis « Tous publics »
  • Date de sortie : 10 septembre 2021
  • Pagination : 88 en couleurs
  • Format : 200 x 268

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