L’Homme en noir
À travers L’Homme en Noir, Giovanni Di Gregorio et Grégory Pannaccione nous présentent un jeune garçon qui s’est construit un monde imaginaire pour fuir ses problèmes dus à l’inceste qu’il a subi. L’histoire trace, étape par étape, les traumatisme de Mattéo, sans pour autant paraître trop violente.

Dès les premières pages, nous sommes plongés dans le cauchemar de Mattéo : des blocs d’immeubles, de nuit, où se découpe soudain une silhouette effrayante : l’homme en noir ! À son réveil, l’enfant est présenté comme quelqu’un de joyeux, dans un univers coloré, et dont la chambre fourmille de jouets en tout genre. Mattéo semble être comme n’importe quel garçon de son âge : il joue avec Tommy, son chien, il a un super copain qui le soutient dans n’importe quelle situation, et il est passionné des « supers animaux », des personnages de fiction dont il collectionne les figurines. Mais voilà, il a aussi beaucoup de problèmes. En plus d’avoir peur de s’endormir seul dans sa chambre, au point de repousser l’heure du coucher, il a du mal à se concentrer à l’école, à se faire des amis, au point que ses parents commencent à s’inquiéter.

Une histoire d’inceste amenée en douceur
L’histoire jongle avec aisance entre les moments où Mattéo s’amuse, et ceux plus sombres quand l’ombre apparaît. Giovanni di Gregorio (Les Sœurs Grémillet, Creepy Past) nous emmène dans un univers d’enfant, où l’on peut suivre un petit garçon dans sa vie de tous les jours, raconté avec justesse et réalisme. La joie de l’enfant se fait ressentir, tout comme son inquiétude lorsque les mauvais souvenirs des violences sexuelles qu’il a subies remontent à son esprit, ou sa terreur lorsqu’il se réveille d’un de ses cauchemars. Et même si ils reste plutôt en arrière-plan, les parents de Mattéo nous transmettent aussi leurs interrogations par rapport au comportement de leur fils. On fait facilement connaissance avec les personnes qui viennent en aide à Mattéo, que ce soit sa mère, son copain ou son docteur. Et surtout, on apprend comment Mattéo lui-même se défend face aux souvenirs qui l’assaillent.

Des dessins colorés pour accentuer le drame
Grégory Pannaccione, dont les dessins expressifs illuminent aussi des romans graphiques comme Quelqu’un à Qui Parler, Un Océan d’Amour et Cabot-Caboche, offre aux lecteurs un douloureux contraste entre les angoisses du jeune garçon, confronté à l’ombre d’un homme menaçant et ses moments de joie innocente, en jouant avec les paysages citadins sombres et des couleurs plus vives. Le dessinateur jongle avec habileté entre les plongées et les contre-plongées pour rendre plus impressionnants des passages de l’histoire, notamment pour donner aux lecteurs l’impression de chuter. Même si le changement des décors au cours des scènes déroute un peu, on comprend au fur et à mesure ce qu’ils signifient, et cela nous rapproche de Mattéo et son propre ressenti par rapport à son histoire.

La bande dessinée, comme la plupart des supports de fiction, peut permettre de témoigner de sujets graves, tout en dédramatisant la situation. L’Homme en Noir parle d’une cause alarmante en l’adaptant pour de jeunes lecteurs, sans pour autant leur faire peur. Ainsi, ils peuvent prendre facilement connaissance de ce qui peut arriver à leurs camarades, voire à eux-mêmes, et agir en conséquence.

Chronique écrite par Serena MORCIANO
Informations sur l’album
- Scénario : Giovanni Di Gregorio
- Dessin : Grégory Panaccione
- Couleurs : Grégory Panaccione
- Éditeur : Delcourt « Mirage »
- Date de sortie : 22 mai 2024
- Pagination : 128 en couleurs
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