Interview de Steve Baker, à l’occasion de la sortie du T2 de Billie Bang Bang

Steve Baker, le tonitruant auteur rouennais de Billie Bang Bang et de La Vie en Slip revient pour les Amis de la BD sur ses débuts dans le 9e art et sur la genèse de deux de ses deux séries phares.

Photo de Interview de Steve Baker
Photo pour l’interview de Steve Baker © Steve Baker

Les Amis de la BD : Steve, peux-tu nous résumer en quelques mots ta formation ? Comment es-tu arrivé dans la bande dessinée ?

Steve Baker : C’est assez simple, j’ai toujours voulu faire de la BD, depuis tout jeune. Au départ, quand j’étudiais, on ne parlait bien évidemment pas de bandes dessinées. Mais, j’avais une super prof d’art plastique qui a appuyé mon dossier pour entrer dans un lycée avec une filière artistique poussée.

Les Amis de la BD : Qu’y a-tu appris ?

Steve Baker : J’y ai notamment appris l’histoire de l’art. C’était vraiment bien pour se construire une culture. Puis, ce fut utile pour la suite de ma carrière.

Crayonné de Billie Bang Bang
© Billie Bang Bang – Steve Baker et Théa Rojzman – Le Lombard

Les Amis de la BD : À la sortie du lycée justement, qu’as-tu fait ?

Steve Baker : Eh bien, je suis entré en fac d’anglais. Je ne trouvais pas la BD très sérieux comme avenir. Mais je suis rapidement revenu sur cette décision. J’ai travaillé afin de pouvoir me payer des études à Bruxelles, à l’institut Saint-Luc. J’ai réussi à passer le concours d’entrée notamment grâce à mes études d’art qui m’ont appris l’anatomie ou l’histoire de l’art, comme mentionné avant.

Les Amis de la BD : Donc… tu es sorti diplômé de Saint-Luc…

Steve Baker : Il est presque reconnu qu’on ne devient auteur de BD que si on ne parvient pas au bout des trois ans du cursus de Saint-Luc. Je suis un peu l’exception qui confirme la règle [il se marre].

Encrage de Billie Bang Bang
© Billie Bang Bang – Steve Baker et Théa Rojzman – Le Lombard

Les Amis de la BD : Quel fut ton premier projet ?

Steve Baker : Un éditeur m’a présenté Pascal Jousselin pour dessiner le second tome de la série Voltige et Ratatouille, Les Voleurs de salsifis. Ce fut édité chez Milan. Pascal m’a beaucoup aidé à ce moment-là.

Les Amis de la BD : Comment as-tu débuté avec La vie en Slip ?

Steve Baker : Je n’avais pas spécialement de scénariste, j’ai donc commencé à me lancer dans l’écriture de La Vie en Slip. J’ai dessiné quelques gags, peut-être une vingtaine que j’ai présentés à Milan. Mais rien de concret n’est arrivé.

Couleurs de Billie Bang Bang
© Billie Bang Bang – Steve Baker et Théa Rojzman – Le Lombard

Les Amis de la BD : Puis, est arrivé Pif Gadget…

Steve Baker : En travaillant chez Pif Gadget, j’ai effectivement réalisé bien plus de pages. Je travaillais régulièrement sur la série. En parallèle, j’ai débuté une collaboration avec Joël Jurion qui aimait bien mes gags et mes histoires. On a publié ensemble Les Démons de Dunwitch, j’assurais le scénario. Un projet édité chez Vent d’Ouest.

Les Amis de la BD : L’aventure Pif n’a pas duré… Tu as atteri chez Dupuis et notamment dans le Journal de Spirou avec La Vie en Slip…

Steve Baker : Dans ces années-là (NDLR : 2008), Pif Gadget était en difficulté financière. J’ai donc contacté Dupuis. Mais l’éditeur trouvait ça un peu trop trash pour le magazine. Il a dont fallu m’adapter un peu. Je réalise donc tout de même plein de pages. Assez pour constituer plusieurs albums. On a ainsi sorti 3 albums en 4 ans.

Les Amis de la BD : Puis la série s’arrête…

Steve Baker : Au moment du tome 4, il y a « mouvement de chaises éditoriales » aux éditions Dupuis, je perds donc mon éditeur. Toutefois, au moment de boucler le tome 3, j’ai laissé la fin ouverte. Je trouvais ça plus riche pour le lecteur qui avait une fin de cycle cohérente et pour moi la possibilité de reprendre la série.

Photo de l'interview de Steve Baker
Capture d’écran durant l’interview de Steve Baker © Les Amis de la BD

Les Amis de la BD : Tu retrouves aussi une sorte de respiration avec d’autres projets, non ?

Steve Baker : Oui, pendant La Vie en Slip, j’avais des envies de BD d’aventures. Ainsi, avec Sébastien Floc’h, au scénario, on a commencé le projet Inoxyable. C’est un chouette projet, un album d’une centaine de pages. Il est sorti chez Casterman. Ensuite, Aurélien Ducoudray m’a écrit des projets sur mesure avec Bots qui devait être édité chez Casterman, mais qui sortira finalement chez Ankama qui a fait de gros efforts financiers pour l’éditer.

Les Amis de la BD : Peux-tu nous raconter la genèse de Billie Bang Bang ?

Steve Baker : Théa Rojzman vient vers moi avec un projet jeunesse. Elle y aborde des thèmes que je n’aurais pas osé faire seul. On y parle de relation de couple, de harcèlement ou même pédophilie. On commence dont à travailler ensemble sur le projet. C’est de l’humour de cours d’école, je m’éclate toujours avec des personnages qui font n’importe quoi.

Les Amis de la BD : Comment elle t’a vendu le projet ?

Steve Baker : Elle arrive avec un projet signé et me propose de travailler avec elle. Au départ, ça n’avait finalement pas convaincu le précédent éditeur. On va donc ailleurs, on reçoit une réponse positive du Lombard.

Couverture du tome 1 de La Vie en Slip
Couverture du tome 1 de La Vie en Slip © La Vie en Slip – Steve Baker – Dupuis

Les Amis de la BD : Comment travailles-tu les scénarios que tu reçois ?

Steve Baker : Il y a des description très précises dans le scénario. Il y a souvent plusieurs actions à dessiner dans une seule case. Donc, je dois réaliser un travail de découpage afin d’améliorer la fluidité de la planche. Il est important de pouvoir la comprendre du premier coup d’œil, surtout que la série s’adresse aux plus jeunes.

Les Amis de la BD : Parfois le gag se résume simplement en une planche d’une seule case, comment parvenir à ce résultat ?

Steve Baker : Ces grandes cases interviennent un peu comme des respirations entre les autres gags. C’est un peu un délire complet. On ne sait pas si c’est la réalité, si l’action est dans l’imaginaire de Billie ou si elle se situe un peu entre les deux.

Les Amis de la BD : Peux-tu nous décrire le travail graphique sur Marto, le monstre qui accompagne Billie ?

Steve Baker : J’ai effectué différents tests afin de dessiner un truc un peu effrayant et monstrueux, mais également sympathique. Je lui ai donné un côté horrible avec ses cornes et ses grandes dents. Mais c’est également un personnage qui a un côté rassurant. Il protège aussi Billie. Il oscille entre le cartoon et la terreur.

Les Amis de la BD : Quel retour as-tu reçu de la part des lecteurs ?

Steve Baker : Pour le tome 1, il y a eu de bon retour critique, pour le tome 2, c’est encore timide. Les gens doivent encore le découvrir. Ce qui est intéressant, c’est la double lecture. On peut parler de sujets compliqués aux enfants avec cette BD et avec l’énergie de Billie.

Les Amis de la BD : Le papa de Billie ressemble furieusement à Gilles Delouze, éminent membre du trio de La Vie en Slip.

Steve Baker : Et pourtant, ce n’est pas lui, mais il est normal qu’on reconnaisse mon dessin. Mais, c’est vrai qu’il y a cette même touffe de cheveux… un peu imposante.

Les Amis de la BD : Pour en revenir à La Vie en Slip. Ta série a été adaptée en dessin animé, comment cela s’est-il concrétisé ?

Steve Baker : Un studio d’animation a acheté une option pour l’animation de La Vie en Slip. Ensuite, il y a eu une démarche auprès des chaînes de télévision pour assurer le financement de la production. Canal + a accepté le projet. Quelques épisodes ont été réalisés et validés.

Les Amis de la BD : As-tu eu un travail spécifique à faire sur ce projet ?

Steve Baker : Avec mes trois pauvres personnages, il n’était pas évident de réaliser 52 épisodes de 11 minutes. Donc, on en a créé de nouveaux : les parents du trio, le jardinier, etc. C’était une bonne manière aussi de conserver mes droits sur le projet.

Les Amis de la BD : L’esprit de la série a-t-il été conservé ?

Steve Baker : Pour Canal +, le côté débile et trash leur plaisait pas mal. C’était donc un avantage.

Planche de Sorciers et souriciers interview de Steve Baker
© Sorciers et souriciers – Steve Baker Fabien Grolleau – Dupuis

Les Amis de la BD : Que ressent-on lorsque l’on voit ses personnages s’animer ?

Steve Baker : Du coup, les personnages m’échappent totalement. Je trouve ça à la fois cool et super bien ! De plus, les voix des comédiens sont franchement très chouettes. J’aime beaucoup cette adaptation.

Les Amis de la BD : Est-ce que cela a une influence sur la Vie en Slip, la BD ?

Steve Baker : Eh bien oui. Il y aura maintenant un tome 4, dans lequel je vais intégrer les nouveaux personnages créés pour la série animée.

Les Amis de la BD : Dessin animé, tes séries ainsi que les autres projets en cours, comment fais-tu pour tout mener de front ?

Steve Baker : C’est vrai que je suis un peu « charrette » niveau boulot. Avec Fabien Grolleau, on a aussi travailllé sur le projet Sorciers et souriciers dont certains épisodes ont été publiés dans le journal de Spirou. Pour répondre à ta question. Concernant le tome 4 de La Vie en Slip, je collabore avec le directeur d’écriture de la série animée. C’est une aide précieuse, on fait un boulot plutôt drôle. Puis, j’ai engagé une coloriste pour en réaliser les couleurs.

Planche de Sorciers et souriciers interview de Steve Baker
© Sorciers et souriciers – Steve Baker Fabien Grolleau – Dupuis

Les Amis de la BD : Enfin pour terminer, quelles furent tes sources d’inspiration, plus jeune ?

Steve Baker : Plus jeune, j’ai eu la chance de rencontrer Turk, le dessinateur de Léonard. C’est ce genre de lecture qui m’a donné envie de faire de la BD. Mais finalement, je trouve des influences dans de multiples domaines : mangas, comics ou BD d’aventure.

Interview de Steve Baker recueillis par Bruce RENNES

A lire en complément de l’interview de Steve Baker, notre chronique du deuxième tome de Billie Bang Bang

Vous pouvez discuter de l’interview de Steve Baker sur notre groupe Facebook des Amis de la bande dessinée.