Interview de Midam, auteur de Kid Paddle et Game Over

Pendant la fête de la BD bruxelloise, l’auteur de Kid Paddle faisait des dédicaces pour le plus grand plaisir de ses lecteurs. À cette occasion, il a accordé une entrevue aux Amis de la bande dessinée, pour notre plus grand plaisir, l’interview de Midam est à lire sur notre site.

Photo de Midam
Photo de Midam © Olivier Charlet Photography

Les Amis de Spirou : Quel est votre parcours ? Comment êtes-vous arrivé à Kid Paddle ?

Midam : En humanité, j’ai fait les sciences économiques. J’ai ensuite enchaîné un an d’architecture d’intérieur, puis un an de photographie, trois ans d’illustration à Saint Luc, et pour finir mon service militaire. Après, j’ai été au chômage pendant six ans, jusqu’à 30 ou 31 ans. Je n’ai rien trouvé car le diplôme d’une école de de dessin ne donne pas grand-chose d’autre que le diplôme en lui-même.  J’ai donc dû réapprendre le dessin en autodidacte, contacter moi-même des journaux. Cela n’a pas été facile, jusqu’à ce que je démarre réellement. Mais avant cela, pendant 6 ans, j’étais un peu livré à moi-même, je jouais au snooker la nuit, j’allais dormir à 6-7h du matin… Je n’ai rien fait de ma vie à ce moment-là, puis, à un moment, j’ai eu un déclic et c’est parti : j’ai proposé mes dessins à plein de journaux, entre autres à Spirou.

Les Amis de Spirou : Comment les premiers contacts avec Spirou se sont passés ?

Midam : Ils m’ont dit : « Ce que tu fais, c’est beaucoup trop pompé sur Calvin et Hobbes, de Bill Watterson ! ». A l’époque, j’étais un grand fan, et ça se voyait trop.  Ils m’ont donc dit de retravailler, ce que j’ai fait… et ils ont trouvé que c’était devenu pas mal pour boucher les trous. Alors, j’ai fait des petits dessins pour alimenter le journal Spirou pour une rubrique sur les jeux vidéo, sur la cassette du Roi Lion qui venait de sortir, … Je devais seulement faire un petit dessin mais j’étais dans la place. Je m’en foutais de ne pas avoir de série, car j’étais surtout heureux d’être dans la place, et je savais que ça allait bien marcher.

Première publication de Midam dans Spirou
Première publication de Midam dans le journal Spirou n° 2831 du 15 juillet 1992.
© Spirou n° 2831 – Dupuis

Les Amis de Spirou : Vous aviez comme ambition de faire une série un jour ?

Midam : J’avais l’ambition, mais je ne trouvais pas d’idée de série. On dit souvent que l’art naît de la contrainte, se nourrit de travail et meurt de liberté.  C’était un peu ça, et c’est encore ça à l’époque : si je n’ai pas de contraintes, si on me dit que je peux faire n’importe quelle série dans n’importe quel domaine, je vais être perdu. C’est bien d’avoir une contrainte et là, c’était : « On a un créneau, c’est dans le jeu vidéo. Ça t’intéresse ? ». Je me suis dit que mon créneau avait peu d’importance :  ils m’auraient donné le chapitre pâtisserie de Spirou, Kid aujourd’hui s’appellerait Kid Chantilly mais il aurait les mêmes histoires, les mêmes gags, j’en suis persuadé.

J’ai donc sauté sur ce créneau et ça a pris directement. Après un an, le directeur de Spirou a été voir le directeur éditorial, le type qui décide si on fait des albums ou pas, et il a dit qu’on allait faire des albums.

Les Amis de Spirou : Etiez-vous joueur de jeux vidéo à l’époque ?

Midam : Pas du tout, je ne le suis toujours pas d’ailleurs.  Je ne le suis pas parce que ça prend beaucoup de temps.

Première publication de Kid Paddle
La première publication de Kid Paddle pour illustrer la rubrique sur les jeux vidéos dans le numéro 2890 du 1er septembre 1993 que nous a parlé l’auteur dans l’interview de Midam.
© Spirou n° 2890 – Dupuis

Les Amis de Spirou : Vous n’avez pas dû vous y mettre pour trouver des gags ?

Midam : Oui, j’ai essayé, mais cela ne m’a pas apporté de gags, plutôt beaucoup de temps perdu parce que je suis joueur dans tout : ainsi, une fois que je commence un jeu vidéo, je dois le terminer. C’est vraiment une drogue et je me suis très vite rendu compte que c’était antinomique avec le travail qu’on demandait que je fasse. En effet, la bande dessinée, c’est très chronophage, ça prend beaucoup de temps.

Les Amis de Spirou : Dès lors, d’où puisez-vous vos références de jeux vidéo ? Des magazines ?

Midam : Au début, on me donnait trois jeux vidéo par semaine et je devais en intégrer un dans un gag en une planche.

Les Amis de Spirou : Donc, vous étiez obligés de jouer au jeu testé ?

Midam : Oui, mais j’ai seulement fait cela pour les 15 premiers gags de Kid.  Après, j’ai arrêté et aujourd’hui, je ne parle pas de jeux vidéo. Car parler de jeux vidéo précis donne une date, une référence dans le temps et c’est toujours très mauvais.  Par exemple, je suis toujours très emmerdé quand je dois dessiner Kid qui téléphone, ou qui regarde la télévision parce qu’en regardant le modèle, tu sais l’année. Prenons un vieux Nokia, début 2000, c’était courant, mais le gamin d’aujourd’hui qui va acheter la BD, il se dit : « C’est quoi ce truc ? C’est une vieille BD, je n’en veux pas. ». J’ai essayé très vite de botter en touche en expliquant que le téléphone, c’est un téléphone du grand-père qu’il a donné pour sa chambre. Ça peut arriver : par exemple, dans ma chambre, j’avais la vieille télévision familiale. On s’en fout que ce soit du vieux matos dans Kid Paddle, si on sait que c’est du matos de récupération. Cela permet d’avoir une tolérance dans le temps. Évidemment, dans le salon, c’est plus difficile : je serais obligé de faire un écran plat, et je crois que je n’ai jamais dessiné la télévision du salon pour éviter ce problème.

Les Amis de Spirou : On ne se rend pas compte de tout cela.

Midam : Il y a beaucoup de choses donc vous ne vous rendez pas compte. Comme quand j’ai fait le dessin animé. Les scénaristes m’ont demandé de faire le plan de la maison de Kid, pour arriver à situer les pièces. Mais je n’ai pas de plan. Ils ont donc du décider arbitrairement que la chambre de Kid était à côté de celle de Carole. Mais dans la BD, parfois elle est à gauche, parfois elle est à droite parce que, dans le récit, c’est plus facile de mettre à droite qu’à gauche et peu importe. Cependant, il y a des puristes qui disent que c’est très important parce qu’inconsciemment, cela donne une crédibilité au tout, mais je ne suis pas convaincu de cela.

Couverture du tome 18 de Kid Paddle
Couverture du nouvel album de Kid Paddle, qui sort le 4 novembre 2022.
© Kid Paddle – Midam – Dupuis

Les Amis de Spirou : Et comment faites-vous pour les décors de la salle d’arcade ?

Midam : C’est plus facile parce que je fais un jeu, et, comme j’ai horreur des décors, je fais un profilé : je fais une ligne de décor avec des silhouettes de jeux à l’arrière. Pour l’architecture, j’ai horreur de dessiner une marche, un couloir, une porte, c’est pourquoi j’en ai dessinés très peu. On ne voit pas grand-chose de la salle d’arcade, même si je pense qu’une fois, Kid est allé aux toilettes de la salle d’arcade, mais c’est tout. Je ne commence pas à construire une salle d’arcade.

Les Amis de Spirou : Est-ce que Spirou vous conseille parfois pour les gags ?

Midam : Non, ils ne sont pas assez bons [Haha]. Faire des gags, c’est un vrai métier -ceci dit, le bras droit du rédac chef de l’époque m’a beaucoup aidé en tant que laboratoire à idées, je testais différentes fins pour certains gags. D’ailleurs, pour rendre la série plus efficace, j’ai aussi un site qui s’appelle gameoverforever.com, où les gens m’envoient des idées pour Game Over. De temps en temps, il y a des idées pour Kid. J’aimerais bien qu’il y en ait plus parce que j’ai un peu cédé le flambeau à des scénaristes et à des dessinateurs pour pouvoir un peu plus profiter de la vie.

Quand je dis que c’est chronophage, on ne se rend pas compte à quel point ! J’ai travaillé pendant des années 12h par jour, samedi et dimanche compris.  Je partais rarement en vacances, et quand je partais, je travaillais beaucoup : je faisais du scénario comme je ne pouvais pas dessiner. A un moment, ça rend dingue et ce n’est plus gérable, tu n’as plus de vie personnelle. C’est très compliqué.  Plus la série fonctionne, plus l’éditeur veut des albums. Depuis qu’il y a deux séries, c’est aussi deux fois plus de travail. Alors, à un moment, j’ai dit que je préférais augmenter ma qualité de vie et fermer les yeux sur certaines imperfections du dessin ou du scénario parce que je soupçonne le public de ne pas vraiment faire la différence.  Je vois par exemple cela dans les dédicaces de Bruxelles, certaines personnes adorent des gags que je pensais très faible…comme quoi. En ce qui concerne les dédicaces, il y a souvent un groupe de personnes, toujours les mêmes, qui me demandent des dessins compliqués. Quand je dédicace à Bruxelles, ils sont toujours là, ils ont déjà eu trente albums et ils veulent le trente et unième.  Je tourne avec une dizaine de dessins de dédicaces différentes, mais ils me disent : « Cette fois-ci, on aimerait bien ça ! ». C’est compliqué parce que je dois recomposer un vrai dessin, et je dois prendre 5 ou 10 minutes. Or, la file des dédicaces est construite pour faire trois minutes par personne, sinon je suis encore ici jusqu’à minuit.  Je fais donc des dessins qui sont souvent ratés, mais ils sont encore contents ! Je me dis si lui est content, je crois que je peux baisser un petit peu mon niveau d’exigence au niveau des albums. C’est ce qui se passe aujourd’hui et ça se vend très bien. On ne voit pas que c’est un peu moins bien dessiné (ou plutôt moins fidèle à ma main), que c’est un peu moins bien scénarisé. Et comme cela, je fais autre chose à côté, je fais de la peinture, de la sculpture et des illustrations.

Planche 13 du T18 de Kid Paddle
Un gag extrait du nouvel album.
© Kid Paddle – Midam – Dupuis

Les Amis de Spirou : Comment se déroule la répartition du travail avec vos assistants ?

Midam : Tout est virtuel. Je ne les rencontre pas, parce que je n’ai pas le contact facile, je suis un peu asocial …. J’ai 5 ou 6 scénaristes et deux dessinateurs pour Game Over et Kid Paddle. Ils m’envoient tout par WhatsApp ou mail. Je travaille plus par WhatsApp que par mail, car via WhatsApp, c’est immédiat, les mails, c’est plus long.  Quand on ne me répond pas dans les 10 secondes, ça m’énerve car je le fais, je réponds jour et nuit. Ils m’envoient des idées, soit des pitches, soit des scénarios tout fait.

Je préfère un pitch pour ne pas faire perdre de temps au scénariste, dont l’idée n’est pas pertinente selon moi, pour qu’il ne développe pas un scénario complet. Avec un pitch en trois phrases, je peux dire s’il vaut la peine de le développer, ou si cela n’en vaut pas la peine. Pour le moment, je travaille avec des nouveaux que mon éditrice m’a envoyés, parfois c’est bien, parfois pas… J’en fais aussi de temps en temps.

Les Amis de Spirou : Vous retenez en moyenne combien de leurs propositions ?

Midam : C’est un sur 10, parfois un sur 100.

Dans le temps, en règle générale, quand tu t’associais avec un scénariste, c’était comme un mariage : c’était le pire et le meilleur, et le dessinateur devait prendre des mauvais scénarios, car travailler avec un scénariste, c’était lui faire confiance. Je n’ai jamais travaillé comme ça, je ne prends que ceux qui me semblent les meilleurs. Quand un gars m’envoie cinq scénarios et je n’en prends qu’un, c’est sûr qu’il ne va pas être content. Cela ne va pas lui donner envie de se remettre directement au travail, ce que je comprends bien. J’essaye donc d’arranger le scénario pour qu’il puisse, selon moi évidemment, être publiable, ou alors c’est moi qui fais un pitch.

Par exemple, hier, avant d’aller dormir, j’ai fait un pitch : je me disais que ce ne serait pas mal de faire Kid qui arrête de jouer aux jeux vidéo, qui commence à étudier la médecine, qui a plein de bouquins ; puis il est adolescent, il continue ; il est universitaire ; il réussit ses études, il fait une spécialisation et il devient professeur émérite ; puis il fait des conférences et à 50-60 ans, on lui propose enfin le poste de directeur de l’Organisation Mondiale de la Santé. C’est à ce moment-là qu’il va pouvoir classifier le chocolat comme légume, et on va avoir le nutri-score du brocoli absolument alarmant, E, alors que les chips c’est A. A la dernière case, on a Kid en train de manger, avec Big Bang par exemple, et le père lui dit : « Mange des brocolis, c’est bon pour toi ! ». Et on se rend compte que Kid a expliqué tout ça à Big Bang ! Big Bang lui dit que le plan est génial mais c’est juste un peu long.

Ce pitch serait en une ou deux pages, et ce serait le premier gag où on voit Kid vieillir. Attention, attention, je ne suis pas encore sûr, car je n’ai jamais fait vieillir Kid ! J’ai déjà pensé à ça mais c’est compliqué pour moi : c’est comme une patate chaude, que je vais donner à Ian Dairin, qui dessine les Kid maintenant et je vais voir. J’avais déjà fait Kid âgé mais c’était dessiné par un pote dessinateur : Ralph Meyer- un gars super bon, mais il l’avait fait dans un style réaliste, et comme cela, on perd un petit peu la référence avec la BD-je pourrais faire cela. Ou voir comment Ian peut s’en tirer…

Une planche en noir et blanc
Un extrait que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam © Kid Paddle – Midam – Dupuis

Les Amis de Spirou : Comment se déroule la répartition du travail avec vos assistants dessinateurs ? Vous faites le crayonné, l’encrage ?

Midam : Non, j’ai vraiment tout cédé. Je valide ce que fait Ian Dairin ou Adam, je fais des corrections, de temps en temps, mais j’en fais de moins en moins.

[Midam sort son téléphone et nous montre des dessins de la conversation Whatshapp avec Ian Dairin] 

Voici quelques corrections :

[Il nous montre une planche de Ian Dairin, suivie d’un dessin réalisé par Midam, où il reprend l’un des personnages, une vendeuse, accompagnée de l’annotation : « Fais la vendeuse avec moins d’entrain. ».]

Dessin par Midam
Un croquis que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

[Il nous montre une planche avec un petit beurre, dessinée par Ian Dairin au début de leur collaboration et couverte d’annotations de Midam.]. 

Dessin par Midam
Un croquis que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Il commençait, et c’était mauvais. Il était encore dans son style. En rouge, c’est moi qui me suis énervé, et finalement, je me suis dit : « OK, je vais arrêter de noter parce que c’est plus simple si je lui montre. ».

[Midam nous montre alors un dessin de petit beurre qu’il a réalisé, ressemblant fort à ses blorks.] 

Dessin par Midam
Un croquis que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

[Sur une autre planche, il agrandit une case où Kid a une main levée, celle-ci étant en partie cachée par son visage.]

Ici, c’est un gros cafouillage.  Jamais je n’aurais dessiné une main qui court-circuite le visage comme cela. Si tu le fais, tu le fais, mais beaucoup plus gentiment. Ici, il y a quelque chose qui cloche.

Dessin par Midam
Un croquis que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

[Midam nous montre sa correction de ce dessin de Kid, où seul l’index est légèrement caché par le visage du gamer.]   

Alors, je lui explique, le pouce doit être plus dans l’alignement des autres doigts, …

[Sur une autre planche, Midam fait de nouveau un agrandissement sur la main de Kid, qui montre avec son index quelque chose.]

Ici, 4 doigts sont dessinés, mais on dirait qu’un des doigts correspond à la paume. Il faut bien dessiner les 4 doigts, et la paume- l’éminence thénar et l’éminence hypothénar, deux coussinets différents.

Dessin par Midam
Un croquis que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Les Amis de Spirou : Où peut-on voir vos illustrations et vos peintures ?

[Midam ouvre alors un autre dossier sur son téléphone qui contient des photos de ses tableaux, et de ses expositions.]

Midam : Mes peintures sont des choses qui sortent de l’ordinaire. Ce sont des choses qui m’amusent, c’est très différent et ça emmerde l’éditeur parce qu’il ne sait rien en faire.  Quand je fais ça, il me dit : « Michel, t’as envie de faire une autre série ? ». Mais non, je ne veux plus de BD !  Des illustrations comme celles-ci ne vont pas fort avec quelque chose qui est commercial et donc je traîne ça dans des galeries. Ce n’est pas évident parce qu’il faut un peu ramper dans les petits salons.  Ceux qui voient mes peintures sont des gens qui ne connaissent pas du tout Midam mais ils se disent : « Tiens, c’est quoi ? Vous êtes qui ? Vous êtes artiste ? Oh, c’est intéressant, je vais vous en prendre un. ». Là, tu as une liberté totale et je m’amuse beaucoup à faire ça.  Évidemment, ça n’a pas le même succès que les BD, mais ça m’amuse plus.  C’est un défi, tant mieux !

[Midam s’arrête un moment sur un tableau mêlant blork, couleur sépia, et le logo du Starbucks.]

Peinture par Midam
Un tableau que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Les illustrations classiques [de Kid Paddle et Game Over] se vendent plus facilement, mais associer des personnages de Kid Paddle, comme les blorks, à une marque américaine, il y a quelque chose…Ça me parle. Quand j’étais gosse, je collectionnais des vieux timbres-poste et ceux qui valaient le plus étaient ceux qui avaient cette vieille couleur sépia. En même temps, j’adorerais aussi toutes les séries américaines du genre de Colombo, les Magnum. Tout venait d’Amérique quand j’étais enfant. Les deux ont donc donné ça.

[Midam continue de faire défiler les photos.]

Peinture par Midam
Un tableau que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

J’ai aussi fait une méga pizza-blork, je suis un peu obsédé par la pizza.

Ça, c’était une exposition, il y avait plein de monde, et j’étais très content ! C’était la première fois !

Ici, la blork est habillée avec Louis Vuitton et Chanel, et au-dessus, c’est l’inscription Macy’s, un magazine newyorkais. Je trouve ce mélange génial !

Peinture par Midam
Un tableau que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Un dessin de Kid Paddle avec des blorks, c’est très chouette à faire, je sais que ça va toujours bien donner. Mais, une fois de plus, l’éditeur est hors-circuit parce que ce n’est pas publiable. C’est un format de merde pour eux ! Bah…j’arriverai bien un jour à les convaincre de faire un artbook avec ce matériel…

Peinture par Midam
Un tableau que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Les Amis de Spirou : Ils ne vous demandent pas de faire des couvertures de Spirou dans ce genre-là ? 

Midam : Non, ils ne sont pas trop partants. J’en ai fait une comme celle-là, ils m’ont dit : « OK, on voit l’idée, mais on préférerait que tu fasses le noir et blanc, et nous allons faire les couleurs. ». Ils ne sont pas des touts prenants pour la liberté, ils sont très traditionnels. Ils ne voient pas l’intérêt de voir Kid Paddle et un blork, avec une couleur qui dépasse, pour dire les choses plus simplement. Je comprends, Spirou est très traditionnel. C’est donc plus pour des galeries comme la Brafa, Knokke, …

Peinture par Midam
Un tableau que nous a montré l’auteur pendant l’interview de Midam © Midam

Les Amis de Spirou : Pourquoi restez-vous proche de l’univers de Kid Paddle dans ces peintures ?

Midam : Parce que je me suis dit que cela aurait été trop bête d’avoir travaillé pendant trente ans et puis de devoir recommencer quelque chose à partir de rien. Je me suis dit : « Sois pas con ! ». Geluck a fait pareil : quand il a commencé à faire de la peinture, il est bien entendu parti de son Chat, il n’a pas commencé à faire des monochromes bleus sur fonds bleus. Il aurait pu, mais si tu ne l’as pas fait depuis le début, tu ne peux pas le faire. Il faut quand même penser à être cohérent, pour les gens, pour le galeriste qui va dire : « Vous voyez ça, le truc perdu avec le logo pizza, et le blork derrière ? Ça fait 30 ans qu’il bosse là-dessus ! Mais si tu dis : « Midam s’est lancé dans les monochromes noirs, ça fait 6 mois qu’il fait cela. », ça n’a pas le même poids évidemment ! Donc c’est une réflexion marketing.

Les Amis de Spirou : Trouvez-vous que la communauté des peintres et des galeristes est différente de celle des auteurs de BD ?

Midam : Elle est très différente. C’est un peu la même chose qu’entre la bande dessinée et le roman. Je pense que les auteurs de BD aiment bien les romanciers, mais les romanciers n’aiment pas trop les auteurs de BD. Par exemple, tu demandes à Michel Onfray ce qu’il pense de la bande dessinée, il parlera de quelque chose d’amusant, de divertissant mais qui n’arrive pas à la cheville de la littérature. Je pense que les peintres ont évidemment quelques réticences par rapport à un auteur de BD qui va profiter de sa notoriété BD pour déjà pouvoir taper les mêmes prix qu’un peintre depuis 50 ans. Mais je n’ai pas beaucoup de collègues amis. J’en ai eu dans le temps mais je n’ai plus d’amis qui sont dans le milieu de la BD, je me suis détaché de cela. Je vais peut-être me faire des amis dans le domaine de la peinture, mais ça m’étonnerait.

Les Amis de Spirou : Lisez-vous encore de la BD ?

Midam : Non, j’ai arrêté il y a une quinzaine d’années. J’essaye de lire, je suis un grand fan de John Grisham, c’est un peu commercial mais j’aime beaucoup. Je n’ai pas le temps mental de lire chez moi parce que j’ai mille projets : pour le moment, je travaille sur les NFT- la mode des dessins numériques. Il y a plusieurs sociétés, dont Dupuis, qui veulent faire des NFT, et j’ai donc dû apprendre à le faire sur tablette. Depuis un an, j’ai transposé mon outil qui est un pinceau, et j’ai dû trouver le même outil sur la tablette.  C’est génial parce qu’on peut faire 1000 choses que je ne peux pas faire sur papier et surtout faire des variantes. J’ai toujours aimé faire des variantes. Pour Atlas, pour dessiner des blorks pour des cartes à jouer, il fallait à un moment faire des centaines de variantes de blorks. Maintenant, je vois que les NFT qui fonctionnent sont des variantes toujours d’un même dessin. C’est fait pour moi ce truc-là, ça m’amuse beaucoup ! Mais ça s’est crashé il y a 2 mois-là, du genre moins 40 000% pour certains. Mais ça veut aussi dire que le marché va être assaini et qu’il va peut-être avoir des gamins qui vont pouvoir acheter un dessin « original » pour 10€ , des gamins qui ont un petit portefeuille de crypto et qui aime bien ça.

Propos recueillis par Raphaëlle VANDER GOTEN et Adrien LAURENT

A lire aussi notre chronique du tome 21 de Game Over

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