Écoute s’il pleut
Subtil mélange de chronique campagnarde, intrigue policière et reconstitution historique avec un soupçon de paranormal, Rodolphe et Patrick Prugne nous emmènent dans une charmante bourgade rurale d’après guerre, dotée de trois moulins.
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Daniel a une quinzaine d’années et a pour habitude de passer les vacances d’été chez sa grand-mère, dans la maison familiale, où il s’ennuie ferme en l’absence de son cousin. Toutefois, il rencontre un jeune garçon de son âge, Paul, qui s’avère habiter dans le troisième moulin de la commune, le plus éloigné, celui qui est tellement embartassé que personne n’y va jamais. Cela lui paraît bien bizarre, mais de fait, il y rencontre Suzanne, la jeune et jolie maman de Paul, qui l’y invite à goûter.
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Le moulin fantôme
Mais la grand-mère est formelle : plus personne ne vit dans ce moulin désaffecté depuis des lustres… au fond, depuis la libération. Voulant en avoir le cœur net, Paul retourne au moulin. La charmante bâtisse où la veille il a bu une délicieuse citronnade est une ruine, visiblement à l’abandon depuis belle lurette.
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Cette dose de fantastique, que Rodolphe (Trent, Kenya, Le Baron Fou…) ose insuffler dans sa chronique historique et bucolique, constitue l’argument principal à partir duquel tout commence, mais devient au fur et à mesure un simple prétexte pour développer une intrigue des plus réalistes qui s’avérera assez vite impliquer tout le paisible petit village. Un choix audacieux s’il en est, tellement la surcouche de paranormal semble incongrue dans un contexte que la littérature, le cinéma, la télévision et même la bande dessinée ne se sont pas privés d’exploiter à maintes reprises. Cependant, le lecteur, probablement très docile mais ne boudant pas son plaisir, se laisse entraîner dans ce postulat de départ, en définitive très astucieux, pour se concentrer assez rapidement sur la sous-couche : une jeune et jolie veuve de guerre, des prétendants éconduits, un charmant soldat allemand…
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Écoute s’il pleut : Le charme intemporel de l’aquarelle
Déjà bien connu des lecteurs pour ses sublimes reconstitutions de l’Amérique et du Canada de l’époque coloniale (Canoe Bay, Frenchman, Pawnee, Pocahontas…), Patrick Prugne met son talent spectaculaire pour les aquarelles au service d’une reconstitution des années 50 des plus convaincantes. Cette technique, associée à une science précise des cadrages, du rythme mesuré et du découpage, fait merveille pour restituer l’ambiance surannée et l’apparente insouciance de la période de l’immédiat après-guerre. Les teintes très subtiles, où le chaud et le froid se côtoient dans quasiment chaque vignette avec un équilibre savant, achèvent de donner une forte identité visuelle à l’album – sans oublier les épisodes de flashback, dotés d’un noir et blanc tout aussi efficace.
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Profondément original et posant plus de questions qu’il n’apporte de réponses, Écoute s’il pleut est une curiosité dont on se délecte d’une traite. À la fois intriguant et attachant, cet album a le grand mérite d’éclairer d’une lumière inédite – et audacieuse – des réalités historiques dont on a connaissance, mais qu’on a trop tendance à reléguer au rang de l’anecdote. Il fallait des auteurs au talent de ce duo impeccable (dont c’est la première collaboration) pour accomplir la tâche avec autant de réussite.
©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
Une chronique écrite par : Philippe Barre
Informations sur l’album :
- Scénario : Rodolphe
- Dessin : Patrick Prugne
- Éditeur : Daniel Maghen Editions
- Date de sortie : Le 28 août 2024
- Pagination : 72 pages en couleurs
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©Daniel Maghen Editions – Écoute s’il pleut – Rodolphe et Patrick Prugne
