Interview avec Sylvain Runberg
Le scénariste franco-belgo-suédois Sylvain Runberg a accepté notre demande d’interview à l’occasion de la parution de l’adaptation du Capitain Flam en bande dessinée, mais aussi pour discuter de son travail de scénariste et du reste de son actualité.

© Sylvain Runberg
Les Amis de la Bande Dessinée : Bonjour Sylvain, et avant toutes choses, merci beaucoup d’avoir accepté cet entretien pour les Amis de la Bande Dessinée.
Sylvain Runberg : Bonjour, Les Amis de la BD !
Les Amis de la Bande Dessinée : Ma première question porte sur ton activité. Depuis le début de l’année, tu en es à six albums publiés sur des sujets très divers. Tu es un peu touche-à-tout, à part peut-être la BD d’humour ?
Sylvain Runberg : Oui, tout à fait. Dès le départ de ma carrière de scénariste aux alentours des années 2000, j’ai commencé avec plusieurs projets très différents. Il y avait Orbital, une série de science-fiction – space opera, il y avait Hammerfall, une série de fantasy historique dans le monde scandinave – médiéval – Viking, pour faire court. Il y a eu Astrid, un projet jeunesse, London Calling qui était un drame urbain autobiographique dans l’Angleterre des années 90, les Colocataires qui était aussi assez biographique, il avait un petit côté humoristique mais satirique, ce n’était pas de l’humour à proprement parler.

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© Runberg – Tallone – Kana (Dargaud-Lombard s.a)
Donc il y a eu des premiers projets qui étaient très variés au niveau des genres et des thématiques abordées qui reflètent mes goûts en tant que lecteur et spectateur et, en fait dans mon écriture, cette diversité s’est tout de suite implémentée. À mes débuts, c’est vrai que ce n’est pas quelque chose que j’ai intellectualisé, mais il se trouve que j’ai commencé à monter des projets très différents parce que c’est ce qui m’intéresse aussi, de pouvoir travailler en même temps sur des univers, des thématiques et des personnages divers. Et du coup, ça a continué comme ça tout au long de ma carrière et 20 ans plus tard, on retrouve encore cette diversité dans les genres et les thèmes.

© Les Colocataires – Sylvain Runberg – Christopher – Delf – Editions Dupuis
Les Amis de la Bande Dessinée : D’accord, mais ce n’est pas trop compliqué de passer d’un thème à l’autre comme ça ?
Sylvain Runberg : Oui, c’est complexe, mais je suis très organisé. Avant d’être scénariste, j’ai été salarié pendant une dizaine d’années, alors j’ai conservé des horaires de travail classiques. Je commence à 09h00 et je termine à 18h00 en évitant le week-end. J’essaie de m’y tenir mais, parfois, ce n’est pas possible. J’établis des plannings souvent six mois à l’avance. Je sais à peu près chaque semaine sur quoi je vais travailler pour éviter le stress d’avoir l’impression d’être submergé ou de ne pas avoir le contrôle sur mon planning. Après ça peut bouger, mais c’est une trame. Donc, ça ne me pose pas de problème de passer d’un sujet à un autre très différent. Cela me stimule intellectuellement et cela me permet aussi de prendre du recul par rapport au projet en cours. Je travaille dessus pendant quelques jours, ensuite je le mets de côté pendant une semaine ou deux, et quand j’y reviens, j’ai un regard neuf avec une perspective sur ce que j’ai écrit auparavant. C’est comme ça que je travaille depuis 20 ans, c’est une mécanique bien rodée et c’est quelque chose que j’aime bien faire.
Je peux mener de front douze projets complètement différents dès lors que j’ai cette organisation et que je prenne beaucoup de temps pour élaborer mes projets. Souvent, avant de proposer un projet à un éditeur ou un producteur, il y a eu plusieurs années de gestation. Capitaine Flam ça a démarré en 2017. Nephilims, dont le tome 2 est sorti cette année chez Lombard, j’ai commencé à prendre des notes sur le sujet, c’était au Comic Con de New York en 2014, je pense.
Au final, le premier Nephilims est paru en 2022. On peut avoir l’impression que ça va vite une fois que c’est signé et publié chez un éditeur mais il y a des années de travail en amont. Il n’y a pas de miracle, si l’on veut à la fois de la diversité, de la régularité et de la qualité, il faut pouvoir prendre son temps.

© Nephilims – Dusa David – Runberg Sylvain – Crety Juliette et Stéphane – De Cock Elvire – Le Lombard
Les Amis de la Bande Dessinée : Comme on a pu le voir avec Nephilims, tu coscénarises aussi, ça se passe comment ?
Sylvain Runberg : Pour la co-scénarisation, ça dépend vraiment des projets, mais c’est quelque chose dont j’ai l’habitude. La première fois où j’ai coscénarisé je pense que c’était pour Mic Mac Adam avec Luc Brunschwig qui m’avait proposé de venir travailler avec lui sur les deux derniers épisodes en 2010. Pour Nephilms, au début j’étais seul, ensuite à ma demande, David Dusa s’est greffé dessus parce que je trouvais intéressant de scénariser avec lui. C’est un ping-pong créatif, on échange. Il y a un premier jet, ça peut être moi ou le co-auteur, tout dépend qui est à l’initiative du projet, et ensuite au fur à mesure, c’est un puzzle qu’on assemble à deux. Je travaille aussi depuis quelques années sur des projets de séries télévisées, où là il y a des writing room, avec plusieurs auteurs. Ça aussi c’est encore un autre exercice de travail en équipe.
Les Amis de la Bande Dessinée : Une série en France ?
Sylvain Runberg : Il y a une série que j’ai créée il y a quelques années qui s’appelle Cryptid. Elle a été créée et diffusée en Suède et elle s’est vendue dans quelques autres pays dont la France. Et je travaille aussi actuellement sur plusieurs projets de séries télévisées qui sont « optionnées » par des boîtes de production en Suède et en France.
Les Amis de la Bande Dessinée : La Suède, est-elle à l’origine du projet ? Parce que le capitaine Flam, il me semble, a connu le succès en Suède bien plus tôt qu’en France.
Sylvain Runberg : Oui, je suis franco-suédois mais j’ai principalement vécu en France. En fait, je vis entre la Suède et le sud de la France depuis une quinzaine d’années et maintenant j’habite à Stockholm, mais j’ai grandi en France dans le Vaucluse et donc dans les années 70, 80, j’étais en France.

© Capitaine Futur – Edmond Hamilton – Editions Le Belial
Capitaine Flam n’a jamais été diffusé en Suède je crois, par contre les livres du capitaine Futur y sont arrivés au début des années 70. la première diffusion en France, le 7 janvier 1981 de mémoire dans les Visiteurs du Mercredi, pour moi, ça a vraiment été un choc. Il y avait déjà eu Goldorak, que j’aimais beaucoup, mais avec le capitaine Flam, il y avait cet aspect très très adulte, assez brutal et complexe aussi, qui m’avait complètement fasciné. C’’est devenu mon dessin animé préféré. Je pense que ça m’a beaucoup influencé, au même titre que d’autres œuvres comme Alien ou Blade Runner, parce que ça a vraiment marqué à l’époque en fait. Cet aspect space opera, avec des scénarios complexes qui se déroulent sur plusieurs épisodes, c’était très différent de ce que pouvait être Goldorak. Albator, lui, est peut-être plus dans cette ligne-là. Et puis, il y avait cette espèce de véracité dans le récit, en tout cas pour les yeux d’un enfant de 10 ans en 1980, on voyait clairement des personnages mourir, ce qui n’est pas le cas forcément dans Goldorak.
Dans Goldorak il y aussi des évolutions de personnages, mais dans capitaine Flam, c’est très différent car c’est l’adaptation de romans américains de space opera des années 40–50 d’Edmond Hamilton, donc ça m’avait vraiment marqué. Probablement que sans capitaine Flam il n’y aurait pas eu Warship Jolly Roger, Space Relic Hunters ou Orbital quelques décennies plus tard.
Les Amis de la Bande Dessinée : C’est toi qui as proposé le projet ou c’est Kana ?
Sylvain Runberg : En 2017, la collection classique n’existait pas encore officiellement, j’ai envoyé un mail comme on envoie un satellite dans l’espace à Christel Hoolans, la directrice de Kana, en lui disant : « voilà Christel, Il y a quelque chose que j’aimerais vraiment faire et j’imagine que si c’était possible de le faire, ça serait évidemment avec Kana, même si je pense que ça n’aboutira pas, mais je te le propose. J’aimerais bien faire une adaptation de capitaine Flam ». Je pensais qu’on allait me répondre « c’est une bonne idée mais non, ce n’est pas dans nos projets et c’est pas possible ». Et en fait, quelques heures après Christel me répond : « les grands esprits se rencontrent, parce qu’on est en train de monter une nouvelle collection, la Kana Classics, et capitaine Flam fait parti des œuvres sur lesquelles on aimerait bien créer un projet ». C’est parti de là et on a réussi à le faire. Alors, ce qui était aussi une particularité de capitaine Flam, c’est qu’il n’y a pas un, mais deux ayants droits. Ce sont les descendants d’Edmond Hamilton, qui vivent en Allemagne, et la Toei Animation à Tokyo. Il fallait convaincre les deux parties et on a réussi.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Ça a dû être le Graal absolu du coup pour toi ?
Sylvain Runberg : Oui, au départ c’était vraiment une grande joie et un honneur de voir qu’on les avait convaincus. Ensuite il y a eu des stades de validation tout au long de l’avancée de l’album, sur les Storyboard, sur le scénario, sur les designs, et tout a été validé au fur et à mesure. Ce qui est assez incroyable car quand il y a un ayant droit ça peut être compliqué, mais quand il y en a deux ! On aurait pu se retrouver avec deux visions qui s’opposent et qui bloquent et puis non, à chaque fois, ils ont été convaincus.
Les Amis de la Bande Dessinée : Qu’est-ce qui a été le plus difficile dans l’adaptation ?
Sylvain Runberg : Quand j’ai commencé capitaine Flam, j’avais déjà adapté Millénium de Stieg Larsson qui est un gros morceau aussi. J’avais adapté Conan dans la collection Glénat. J’avais commencé à adapter le roman de Franck Thilliez. Après entre-temps j’ai adapté Liu Cixin qui a fait le Problème à 3 Corps. C’’est quelque chose que j’aime et que j’ai l’habitude de faire. En soi, je n’ai pas connu de période difficile en terme de création, d’adaptation de capitaine Flam. Ça n’a été que du plaisir et d’autant plus parce que à chaque fois que je proposais quelque chose, c’était validé.
Ils ont bien joué le jeu, et on leur a bien expliqué notre adaptation de capitain Flam. Évidemment, il y a des liens avec les romans parce que l’animé est une adaptation des romans, mais c’est d’abord un reboot de la première saison de l’animé de la Toei, puisque moi le capitaine Flam qui m’a marqué, c’est celui que j’ai connu à travers l’animé de la Toei est pas du tout à travers les romans de Edmond Hamilton. Donc c’était logique de le faire comme ça et aussi parce que Kana est spécialisé dans la culture japonaise.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Pourquoi ne pas avoir créé une histoire inédite ?
Sylvain Runberg : Il y a une différence fondamentale entre capitaine Flam, Goldorak et Albator, c’est qu’il n’y a rien eu sur capitaine Flam depuis 1980. A part quelques magazines à l’époque, mais c’est pas du créatif nouveau. Goldorak, et Albator, c’est toujours dans l’esprit du public. Goldorak c’est assez facile de s’en souvenir, même si on n’a pas revu le dessin animé depuis les années 70 80, puisque il y a toujours une mécanique qui est similaire. Les gens se souviennent que c’est Actarus qui combat des golgoths qui arrivent sur terre. Donc faire une suite inédite, ça avait tout son sens. Les gens pouvaient tout de suite rentrer dedans. Sur l’univers d’Albator, il y a eu plein de choses qui ont été faites ces dernières décennies, lui aussi était donc encore bien ancré dans l’esprit du public. Capitaine Flam, quand Alexis Tallone, Kana ou moi-même en parlions autour de nous, tout le monde se souvenait du personnage, du générique, évidemment, éventuellement de quelques membres d’équipage : Grag, Mala, le docteur Wright, Johann, les vaisseaux. Mais dès lors qu’on abordait l’univers et les récits, personne ne se rappelait ni des intrigues, ni même de qui étaient les personnages. Alors évidemment il y a un petit cercle très restreint de fans qui s’en souviennent mais c’est une très infime minorité dans le public.

© capitaine Flam – Toei Animation
Par rapport à cette réalité-là, on s’est dit « autant faire un reboot. On va reposer les bases de tout l’univers, de qui est Flam et d’où il vient ». D’autant plus que la première saison traitait de thématiques qui pouvaient nous permettre de rebondir sur ces bases-là, en les réactualisant, en les rendant contemporaines. L’intelligence artificielle, les transformations corporelles, la conquête spatiale, les notions de colonisation, le rapport entre la politique et la science n’ont perdu ni de leur intérêt ni de leur modernité et elles faisaient vraiment sens pour que l’on fasse une adaptation de la première saison. Je l’avais déjà fait avec Millenium (qui existait déjà en romans, en série télé et en films) : faire en sorte que même les personnes qui s’en souviennent exactement découvrent des choses nouvelles dans notre adaptation. Et puis évidemment, ceux qui ne se souviennent pas, ils vont pouvoir redécouvrir cet univers avec un angle nouveau. Quant aux plus jeunes qui ne connaissent pas capitaine Flam, ils pourront découvrir un univers, qui, on l’espère, à leurs yeux, sera tout à fait contemporain, moderne.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Ces bases de l’animé, c’est ce qui a permis d’accepter une certaine modernisation des personnages ? Johann par exemple ce n’est plus la même et l’histoire, y compris le dénouement final est différent.
Sylvain Runberg : Tu l’as lu ?
Les Amis de la Bande Dessinée : Oui oui j’ai lu la BD, j’ai re-regardé les animés, j’ai lu les premiers romans traduits et édités par le Bélial et j’ai relu la BD après pour vraiment trouver les détails, les différences parce comme toi j’avais des souvenirs de gamins et comme toi j’adorais la série pour le scénario qui était différent des autres. Et du coup je me suis replongé à fond dedans pour faire le travail que j’avais pas fait à l’époque. Et c’est vrai que Johann ce n’est plus l’image de la femme de l’époque, elle est moderne, elle n’est pas en admiration béate devant le capitaine Flam.
Sylvain Runberg : Non c’est vrai, il y a des personnages qui n’ont pas trop bougé, en fait c’est le docteur Simon, Grag et Mala qui sont encore en opposition mais c’est vrai qu’on a fait un récit plus adulte donc ça change pour eux aussi. Après, Flam, il est également un peu différent, il n’est pas aussi monolithique, je dirais. Il a ses failles et il essaye de faire avec. Johann par contre elle n’a rien à voir avec la Johann de l’Animé.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Si tu avais fait la Johann de l’Animé, ça ne serait pas forcément bien compris ! Ce n’est plus le rôle de la jeune femme en détresse qu’il faut sauver.
Sylvain Runberg : Non et puis moi j’ai pas du tout l’habitude de traiter un personnage féminin de cette manière-là. Johann, dans l’animé, la première fois qu’on la voit, le capitaine Flam arrive vers elle, elle rougit et elle murmure « capitaine Flam » dans un élan d’admiration. Dans notre adaptation, c’est une agente spéciale de terrain de la police galactique. Non seulement elle n’admire pas le capitaine Flam, mais elle trouve que c’est potentiellement un boulet et que c’est dangereux de l’emmener avec elle dans une mission car il ne fait pas partie du protocole officiel. Donc, elle est plutôt méfiante et très critique par rapport à lui au départ. Ils vont devoir apprendre à s’apprivoiser pour pouvoir travailler ensemble et ça c’est une différence majeure avec l’animé.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Même Claire, dans l’animé elle est juste là pour servir le café et le changement dans ton adaptation est flagrant, on n’est plus dans l’image féminine des années 80.
Sylvain Runberg : Oui, bon même dans le dessin animé c’est une agente spéciale au départ, mais dans la manière dont le personnage est traité, ce n’est plus c’est une faire-valoir admirative effectivement.
C’est aussi le but, pour moi, une adaptation, c’est une création. Ça a toujours été le cas dans tout ce que j’ai adapté.
En fait, si on part sur les mêmes bases générales de l’animé, y a plein de choses qui changent, par exemple le peuple extraterrestre sur la planète Dénef il change aussi beaucoup par rapport à la manière dont il était montré dans l’animé. Je ne vais rien spoiler mais y a des mécaniques générales qui font qu’il y a des surprises au départ comme à l’arrivée.

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Les Amis de la Bande Dessinée : C’est vrai qu’à la lecture simple, on se dit « oui c’est pareil » parce que notre souvenir est vague, mais si on regarde l’animé on voit qu’il y a pas mal de différences, comme le début par exemple.
Sylvain Runberg : Oui, il y a quelque chose qui manquait dans l’animé, et qu’on a voulu vraiment travailler, c’est la première séquence qui est assez longue. C’est en fait d’où vient Curtis, qui est-il et comment est né le capitaine Flam ? Qu’est-ce qui s’est passé par rapport à ses parents ?
Les Amis de la Bande Dessinée : C’est là que le roman a été utile, même si c’est un peu différent ?
Sylvain Runberg : On a discuté pas mal avec Alexis parce qu’il les connaît bien aussi mais moi j’ai voulu rester un peu à l’écart des romans car ce n’est pas eux qui sont adaptés, c’est vraiment l’adaptation de l’animé de la Toei . Je n’avais pas envie de parasiter le processus créatif en m’impliquant trop dedans, je voulais vraiment garder un peu mes distances en raison de l’angle que j‘envisageais même si les romans sont très bien.

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Les Amis de la Bande Dessinée : Oui c’est amusant de lire les romans et de repérer toutes les petites différences, Grag a sept doigts, Johann est brune… Enfin, comment s’est fait la collaboration avec Alexis Tallone ?
Sylvain Runberg : Avec Alexis, on a été mis en contact par Cristel Hoolans qui le connaissait très bien. Alexis est l’un des grands spécialistes du capitaine Flam en France. En tant que dessinateur il a travaillé souvent avec la Toei et l’univers Japonais, il a fait sa carrière dans cet espace créatif-là. On a tout de suite accroché et aimé ce que l’on proposait l’un et l’autre pour le capitaine Flam et c’est pareil pour Kana. Il y a eu toute une phase de test et d’essais sur des premières planches où il fallait trouver la bonne approche. ça prend du temps, mais une fois que tout a été mis sur les rails, ça n’a été que du plaisir et du bonheur de travailler ensemble. C’est une très très très bonne expérience et je trouve qu’il a fait des planches superbes. Anne Lise, la coloriste, elle a fait aussi un travail exceptionnel donc je suis vraiment très très très content du livre et c’est vrai c’est énormément de travail et c’est un sacré challenge quand même.

© Alexis Tallone
Les Amis de la Bande Dessinée : Oui, parce qu’il ne faut pas décevoir les fans et il faut en conquérir de nouveaux ?
Sylvain Runberg : Oui, tout à fait, après ce n’est pas ma manière de fonctionner intellectuellement.
Quand je suis dans le récit, je suis dans le récit et pour moi la seule manière d’être honnête avec le public c’est d’écrire pour soi-même, que ce soit sur les créations originales ou sur des adaptations. C’est toujours comme ça que j’ai fonctionné. Je ne me suis jamais mis de pression sur le fait de travailler sur un personnage mythique, même si j’en suis extrêmement heureux et honoré. Mais quand je suis dans l’écriture, je ne pense pas à autre chose.

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© Runberg – Tallone – Kana (Dargaud-Lombard s.a)
Les Amis de la Bande Dessinée : J’ai cru comprendre que si l’album marchait bien, il pouvait y en avoir d’autres ?
Sylvain Runberg : Alors c’est un récit complet. Voilà, si ça s’arrête là, et bien ça sera fantastique de toute façon. Nous, on a encore des choses à dire sur l’univers de capitaine Flam et je sais que chez Kana, ils sont tout à fait ouverts pour qu’il y ait d’autres albums. Tout dépendra de l’accueil du public.
Normalement dans les collections classiques, ça ne marche pas toujours comme ça. Les albums sont destinés à être des one-shot. Sur capitaine Flam, effectivement, on a adapté une première saison. Il y a tellement de choses à redécouvrir, à explorer et à traiter de manière contemporaine sur ce qui a été fait, que dans l’idée c’est quelque chose sur lequel tout le monde se retrouve, que ce soit nous les auteurs ou Kana l’’éditeur. Si ce récit est un succès, il y a eu une envie chez tout le monde de continuer.
Les Amis de la Bande Dessinée : Et même créer une histoire originale ?
Sylvain Runberg : à l’image de Millenium ma manière de travailler fait qu’en général, dans le premier récit, il y a des bases très similaires avec l’œuvre adaptée et au fur et à mesure que j’avance dans le récit il y a de plus en plus de choses nouvelles et inédites, et ça serait comme ça avec capitaine Flam. Il y a des bases que l’on pose dans cet album qui sont différentes de leur original, donc de toute façon, s’il y avait d’autres albums, mécaniquement, même si on peut s’inspirer de saisons déjà existantes, il y aurait de plus en plus de choses inédites et nouvelles.

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© Runberg – Tallone – Kana (Dargaud-Lombard s.a)
Les Amis de la Bande Dessinée : OK, sans transition, il y a quelques jours, Angor est sorti, est ce que tu peux nous en dire quelques mots ?
Sylvain Runberg : Oui bien sûr ! C’est la 4e adaptation que je fais des romans de Franck Thilliez avec Franck Sharko et Lucie Henebelle en personnages principaux. Là, c’est un album qui est assez différent des trois précédents en raison de l’évolution des personnages de Franck. Ils sont ensemble et ils deviennent parents de jumeaux. Cela donne un récit qui devient plus intimiste, et particulier en raison de ça. Ensuite, La thématique est très très sombre. il y a un rapport d’opposition entre le côté lumineux de ces deux jeunes parents et l’enquête qui est extrêmement brutale et dure. Ce n’est pas un roman facile à adapter car je veux toujours éviter de tomber dans la surexposition de la violence gratuite. C’est ce qui est difficile quand on passe de l’écrit à la mise en image. Il y a des choses que l’on peut écrire et quand on les met en images, ça peut devenir inapproprié.

© Angor – Franck Thilliez – Sylvain Runberg – Brahy Luc – Lofé Greg – Philéas Editions
Les Amis de la Bande Dessinée : D’où l’importance d’une bonne collaboration avec les dessinateurs ?
Sylvain Runberg : Avec les dessinateurs évidemment, mais aussi les choix que je fais en terme de narration, ce que je décide de montrer, d’écarter. J’espère qu’on est arrivé à un bon équilibre par rapport à ça, même si le lire en soi est très dur.
Les Amis de la Bande Dessinée : Oui c’est très très noir, ça nous ramène à une certaine réalité qui nous change du capitaine Flam.
Sylvain Runberg : Oui, c’est hyper noir. C’est vrai qu’il y a quelques procès malheureusement en France sur des femmes qui ont vécu des choses terribles et c’est vrai qu’on retrouve ça dans ce récit-là. On a vraiment réfléchi, à la couverture par exemple, qu’est-ce qu’on montre, qu’est-ce qu’on ne montre pas ? Il y a toujours cette distance nécessaire et cette pression par rapport aux événements terribles qui sont mis en scène dans l’album pour dire au lecteur «vous lisez des choses terribles, mais pensez toujours aux victimes ». C’est très bien comme ça je trouve. On n’a pas le choix de montrer cette violence mais il faut garder en tête et faire comprendre au lecteur qu’on parle d’être humains qui ont vécu des choses terribles même si c’est une fiction car ça arrive aussi dans la réalité malheureusement.
Les Amis de la Bande dessinée : En début d’année, il y a eu aussi un joli petit succès pour les Griffes du Gévaudan avec Jean-Charles Poupard.
Sylvain Runberg : Oui c’est vrai, l’album a été réimprimé avant l’été, je pense qu’il risque d’être réimprimé avant la fin de l’année ou en début de l’année prochaine. Le premier tirage était de 14 000 donc c’est vraiment un beau score. On est très content de l’accueil du public. Le tome deux sort au printemps prochain. Ce qui va être bien aussi, c’est officiel, Arte va diffuser l’année prochaine une série de documentaires TV sur les légendes en général avec une équipe de production allemande. Ce sera une série en 4 épisodes. Il va y avoir donc le vampire en Europe de l’Est, les fantômes en Écosse, une créature mythique amérindienne aux États-Unis et en France ça sera la bête du Gévaudan. On sera dans le documentaire avec notre bande dessinée, qui sert de pivot, accompagné d’un historien qui habite dans le Gévaudan et qui est spécialiste de la bête pour la narration de cet épisode. Ce sera diffusé au printemps 2025.

© Les Griffes du Gévaudan – Sylvain Runberg – Poupard Jean Charles – Glénat Editions
Les Amis de la Bande Dessinée : C’est chouette, ça va relancer l’intérêt pour la BD. Tu peux nous parler du second tome ?
Sylvain Runberg : Sur le deuxième album on part sur des principes plus fictionnels, puisque là, je ne dévoile rien en disant qu’en fin de compte encore aujourd’hui, il y a de grandes interrogations sur ce qui s’est vraiment passé et qui était ou ce qu’était cet animal ou ces animaux. Est-ce qu’il y a eu intervention humaine ou pas ? Il y a encore des interrogations. Et nous, on voulait apporter une vraie fin dans dans le second album. Donc même si elle est inspirée de choses qui se sont passées dans le Gévaudan historiquement, la fin que l’on propose dans le Gévaudan 2 ne s’est pas passée en réalité dès lors où de toute façon, personne ne sait ce qui s’est passé en réalité. Donc nous avons préféré aller vers de la fiction pure et l’assumer en tant que telle.
Les Amis de la Bande Dessinée : Je ne sais pas si tu le savais, mais Les Griffes du Gévaudan a été élu « coup de cœur du mois » par les Amis de la Bande Dessinée en mars dernier ?
Sylvain Runberg : Oui, tout à fait ! Cela nous avait fait vraiment plaisir.
Les Amis de la Bande Dessinée : Pour conclure, est-ce que tu aurais quelque chose à ajouter ou à adresser aux Amis de la Bande Dessinée ? Des nouveautés à nous annoncer ?
Sylvain Runberg : Merci à vous pour tout ce que vous faites et les mises en lumière des différents albums que vous traitez, c’est vraiment agréable. Et puis, les auteurs ont besoin de ça. C’est vraiment un beau succès quand on voit le nombre de personnes qui vous suivent. Pour ma part, il y a plein de belles choses à venir, les albums dont on a parlé l’année prochaine, et puis en 2025 il va y avoir le tome 3 d’Outlaw, Orbital le tome 9 et ça sera les 20 ans d’Orbital, je ne peux pas en dire plus pour l’instant, mais il y aura des choses qui vont se faire. Ensuite, avec Miki Montllo on a notre Wonder-Woman qui sort aussi en 2025. Et puis d’autres nouveautés qui, j’espère, seront bien reçues par le public.

© Orbital – Sylvain Runberg – Pellé Serge – Editions Dupuis
Les Amis de la Bande Dessinée : Nous les attendons avec impatience. Je te remercie pour pour ta disponibilité et pour toutes ces infos.
Sylvain Runberg : Oui, merci à toi et aux Amis de la BD. Bonne journée, à bientôt.

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© Runberg – Tallone – Kana (Dargaud-Lombard s.a)

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Propos recueillis par : Xavier G.
Vous pouvez discuter de l’interview sur notre groupe Facebook des Amis de la bande dessinée.
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