Spoon & White Neverland - Les Amis de la BD

La série Spoon & White a connu pas moins de trois éditeurs : débutée en 1999 chez Dupuis, Simon et Jean Léturgie ont rejoint Vents d’Ouest en 2003 où ils resteront jusqu’en 2010. Il faudra attendre onze ans pour voir un nouvel album du duo de flics le plus fantasque de la BD chez Bamboo. Depuis lors, l’éditeur de Charnay-Lès-Mâcon réédite les anciens volumes, pour notre plus grand plaisir.

L’Amérique est en deuil : l’avion qui transportait Courtney Balconi, la journaliste vedette de BNN, s’est écrasé. Evidemment, Spoon et White étaient sur le même vol, ils sont tous portés disparus. L’avion s’est abimé sur une île et les survivants parmi lesquels nos deux inénarrables policiers survivent du mieux qu’ils peuvent. Mais bientôt nos survivants vont se rendre compte qu’ils ne sont pas seuls sur cette île.

Perdus sur une île

L’expression est connue : « on ne change pas une équipe qui gagne ». Le scénariste Jean Léturgie reprend donc albums après albums sa recette magique : s’emparer d’une référence cinématographique ou télévisuelle pour ensuite la détourner avec les codes de la série Spoon & White. Dans le cas de Neverland, la référence de base est donc la série télé Lost. Mais bien sûr, Léturgie s’amuse à en ajouter d’autres afin de créer plusieurs niveaux de lecture qui raviront les fans de la série et de critiquer la mentalité américaine. Ici, le lecteur s’amusera à reconnaitre les « guests stars »comme André Franquin en défenseur de la biodiversité et Benoit Poelvoorde sortant ses meilleures répliques en bruxellois… Ce qui est un peu bizarre puisque l’acteur est originaire de Namur.

La formule est connue mais fonctionne-t-elle sur cet album ? Oui et non. C’est toujours le risque avec le genre de la parodie : elle repose sur le fait que le spectateur, ici le lecteur, ait la référence. Sans quoi, tout lui passe au-dessus de la tête. Donc ceux qui n’ont jamais vu un épisode de Lost seront quelques peu… perdus face à cette histoire.

Mais il y a les codes de Spoon & White : les deux policiers, amoureux transis de la belle Courtney Balconi, sont prêts à toutes les folies pour séduire leurs belle et surtout à éliminer le moindre rival. De cette situation découle des situations surréalistes remplies de mauvaise foi et surtout très drôles.

Passer d’un décor urbain à une jungle

Les aventures de Spoon & White se déroulent la plupart du temps à New-York ou dans sa proche périphérie. Les décors sont donc principalement urbains alors que pour cette histoire les décors seront essentiellement une plage et une jungle. Voilà qui a dû changer Simon Léturgie, fidèle dessinateur de la série, qui a aussi dû faire évoluer le design de ses personnages puisque perdus sur une île, ça veut dire pas de coiffeur ni de barbier donc tout le monde a les cheveux longs et un début de barbe. Cela mis à part, le style tout en rondeur et le découpage efficace de Simon Léturgie est bien reconnaisable.

Les couleurs de cet album ont été réalisées par Gom. Rien à redire : c’est le classique aplat de couleurs de la série et le choix des couleurs est certes classique lui aussi mais colle à la réalité des scènes.

Un album typiquement atypique

Cet album de Spoon & White est un peu particulier vu qu’il se passe dans un cadre différent. De la mégalopole new yorkaise on passe à un décor plus exotique dans lequel nos personnages n’ont pas les mêmes repères. Pourtant ils restent eux-mêmes : Spoon continue de citer Clint Eastwood, White n’arrête pas de chambrer son partenaire et Courtney Balconi regrette sans arrêt de n’avoir rien pour filmer. Bref, Jean Léturgie, bien aidé par le graphisme de Simon, a su marier ses références avec ses personnages et inviter de nouveau les lecteurs à chasser la référence ou l’easter egg. Sans oublier les compléments en fin d’album qui feront plaisir aux fans. Que demander de plus ?