Nos Adoptions tome 2 : Nous t'avons abandonné

Depuis la fin de la guerre de Corée, en 1953, de nombreux enfants sud-coréens se sont retrouvés à la rue, seuls. Parmi ceux-là, nombre d’entre eux vont être recueillis par l’orphelinat Holt, puis adoptés en Europe. Pour beaucoup, dont les auteurs de ce livre, de multiples questions restent sans réponses. Ce triptyque permet de donner la parole aux acteurs des adoptions, et cet album laisse la voix aux parents biologiques de ces enfants coréens.

Après Couleur de Peau : Miel, son autobiographie autour de sa propre adoption, et Le Voyage de Phoenix, où il est également question de la venue d’un nouveau membre au sein d’une famille, Jung, accompagné de Laëtitia Marty, s’attarde cette fois-ci, à l’aide de leurs témoignages, sur le point de vue des personnes ayant vécu de près ou de loin l’adoption d’un ou plusieurs enfants coréens.

Alors que le tome 1 Nous t’avons Adopté s’intéresse à l’opinion des parents adoptifs, le tome 2 Nous t’avons Abandonné présente la réflexion des parents biologiques ayant dû abandonner leur enfant pour une raison ou une autre. Si le but est de mettre en lumière ces personnes au passé difficile, l’auteur y souligne la dureté de gérer ses propres sentiments, et le soulagement de partager, au travers de ses œuvres, l’histoire de ceux qui sont des coréens adoptés en Europe.

Jung : un auteur proche de sa thématique dans Nos adoptions

La première partie est la plus puissante émotionnellement, car l’auteur y partage ses propres sentiments. En effet, Jung y fait le parallèle avec son propre passé. D’ailleurs, le chapitre s’intitule “Olivier”, en référence au nom de l’enfant des premiers parents interrogés et proche de l’auteur. Au travers de son voyage, il dénonce la fragilité qu’il ressent en allant à la rencontre des familles biologiques ayant entamé les recherches et retrouvé ou non leur enfant.

Jung raconte la mise en place d’une interview au cœur de Séoul, et surtout la rencontre avec la famille naturelle d’Olivier. Ceux-ci expliquent les difficultés qu’ils ont vécu par le passé, et ce qui ont poussé les parents à devoir laisser leur fils à l’orphelinat, ainsi que la douleur éprouvée.

Une grande palette d’émotions

Les autres récits ressemblent aux lettres de parents à leurs enfants, retrouvés ou non, parfois post-mortem. La plupart des messages suintent le chagrin, et il y a toujours une phrase de regret et l’envie de connaître mieux sa descendance, ainsi que les personnes qui les ont élevés. Les lecteurs ressentent toutes les émotions que suscitent ces hommes et ces femmes, comme la peine quand ils parlent du moment de l’abandon, la solitude, la douleur, mais aussi l’espoir dû aux possibles futurs de leurs enfants une fois adoptés par une autre famille.

Les dessins joliment précis aident à ressentir chaque émotion de plein fouet, et les couleurs ressemblant à celles de vieilles photos, de ton jaune et bleu-gris, permettent une sensation de nostalgie. Le sentiment prédominant que le dessinateur arrive à envoyer adroitement au lecteur est la solitude grâce notamment au lumineux contraste de couleurs.

Après avoir donné la parole aux parents adoptifs et biologiques, Jung et Laëtitia Marty vont écouter celle des enfants, ayant grandi, contraints à quitter leur famille et leur pays. Un avant-goût a d’ailleurs été donné, à l’aide des lettres et des photos d’archives des ces jeunes devenus adultes, avec différents profils et qui ont pour point commun de s’adresser aux parents biologiques, retrouvés ou non.

Une chronique écrite par Séréna MORCIANO

Informations sur l’album :