Le Château des Étoiles - tome 7 : Planète des brumes

Un nouveau cycle s’ouvre pour le Château des Étoiles, la série rétrofuturiste d’Alex Alice. Direction Vénus, la planète aux dinosaures, en partie partagée entre Français et Britanniques, mais où il reste encore beaucoup de territoires inexplorés. C’est donc une scène parfaite pour l’auteur illustrateur, et ses aquarelles, sur laquelle dérouler la suite de sa tragédie géopolitique mais, surtout, profondément humaine.

Après avoir secouru la Princesse de Mars, Séraphin et ses compagnons volent vers Vénus afin de trouver un nouvel orbe pour libérer les Martiaux du joug des Prussiens. Mais l’arrivée sur la planète brumeuse ne se passe pas comme prévu et les aventuriers de l’Ether se retrouvent au cœur d’une nature, luxuriante et menaçante, dans laquelle évoluent de nombreux dinosaures. Grâce à une carte trouvée dans une épave britannique, le groupe part à la recherche du « château » de Vénus. Dans cette atmosphère à la fois belle et oppressante, les relations vont évoluer, les langues se délier, les sentiments s’exprimer.

Le château des étoiles tome 7 Rue de Sèvres planche

Vénus, déesse de beauté et planète de dangers

Dans le second cycle du Château des Étoiles, la planète de Mars, le dieu de la guerre dans la mythologie romaine, possédait un paysage aux contours et couleurs agressifs. Même logique pour Vénus, la déesse de la beauté, puisque nous avons le droit ici à des décors luxuriants et tout en rondeurs, avec des tons bleus et verts apaisants. La planète n’en est pour autant pas moins dangereuse avec sa flore impitoyable et ses dinosaures omniprésents. La magnificence et la menace que représente Vénus est un parfait terrain de jeu pour Alex Alice qui prend un plaisir évident à le mettre en images avec ses sublimes aquarelles. La planète, déjà visitée dans la série dérivée les Chimères de Venus, avec une direction artistique beaucoup plus pop et exubérante de l’illustrateur Étienne Jung, prend dans ce septième tome une ambiance plus pesante, plus mystérieuse. La végétation abondante et les dinosaures prouvent, s’il était encore nécessaire, la maîtrise de l’aquarelle par Alex Alice.

Cette technique toute en douceur est une évidence pour les décors et les créatures de Vénus, mais le pinceau d’Alex Alice fait également des merveilles pour ce qui est des personnages. Si, dans les plans larges, l’aquarelle impose de limiter au maximum les détails, les gros plans sont quant à eux, une grande réussite. Les expressions des visages et les émotions des protagonistes, comme par exemple le doute, la colère ou la joie, sont parfaitement réalisées et créent tout de suite l’empathie du lecteur. Même la Princesse de Mars, au visage minimaliste, parvient parfaitement à transmettre ses sentiments, notamment par le sens du cadrage d’Alex Alice et son talent pour la dynamique des cases.

Le château des étoiles tome 7 Rue de Sèvres planche 46

Quand William Shakespeare visite Jules Verne

Dès ses premiers tomes, le Château des Étoiles a été une série visuellement très cinématographique. Ce septième album ne fait pas exception avec ses plans variés, ses gaufriers simples alternant grandes illustrations contemplatives et planches aux nombreuses cases afin d’accélérer le rythme du récit, de saisir l’urgence ou le danger du moment, ou tout simplement de montrer la simultanéité des réactions des personnages face à un événement ou une parole. Cette mise en scène riche et dynamique convient à merveille à l’histoire qu’Alex Alice nous conte depuis 2014. L’influence de Jules Verne est évidente, et totalement assumée, par ce mélange entre réalisme politique et science-fiction à échelle humaine, mais l’auteur parvient également à donner à son récit une modernité indéniable, notamment au travers de ses héros.

Le château des étoiles tome 7 Rue de Sèvres planche 38

De la romance naissante de Séraphin et Sophie à la profondeur insoupçonnée de certains personnages, comme le Capitaine qui cache, derrière son caractère bourru, une grande culture et un lourd traumatisme, les protagonistes du Château des Étoiles sont l’autre grande réussite de la série et de ce nouveau tome. Avec pas mal de mauvaise foi, on pourrait regretter un certain effacement de Hans ainsi qu’un Von Gudden quelque peu monolithique. Pour le second, son retour un peu « sorti du chapeau » est la seule petite facilité scénaristique de l’épisode, même si elle permet d’amener une nouvelle péripétie qui aura son importance dans le prochain épisode. En ce qui concerne le petit Hans, son rôle très comique, depuis le début de la série, ne colle pas vraiment à la tragédie qui se joue sur Vénus. La série gagne, en effet, tome après tome, une gravité qui prend petit à petit le pas sur l’aventure en elle-même : Alex Alice aime ses personnages et resserre de plus en plus les enjeux de son récit autour d’eux.

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Un début de cycle très réussi dans une série brillante, ce septième épisode du Château des Étoiles poursuit les enjeux lancés dans les précédents épisodes et se permet même d’en ouvrir de nouveaux. Visuellement toujours aussi aboutie grâce aux sublimes aquarelles d’Alex Alice, cette nouvelle aventure nous présente un nouvel environnement, très loin de l’esthétique, magnifique également, d’Étienne Jung dans la série dérivée les Chimères de Vénus. Le talent de l’illustrateur est à son paroxysme, notamment dans la faune et la flore de la planète de la beauté et du danger, et sert parfaitement un récit passionnant faisant de plus en plus la part belle à ses personnages. L’attente sera longue jusqu’à la suite des aventures de Séraphin, Sophie, Hans et leurs compagnons.

Une chronique écrite par : Cédric « Sedh » Sicard