Le Monde est un Joyeux Cimetière

Lorsqu’on évoque un cimetière et un brin d’humour noir dans la bande dessinée, on pense très généralement au plus célèbre des fossoyeurs du 9e art, Pierre Tombal. Avec son Le Monde est un Joyeux Cimetière, Monsieur K. nous plonge dans un univers encore plus délirant de strips en 3 cases qui mènent directement à la morgue.

Le rire en trois cases, avec la mort au bout : voici le défi réalisé par Monsieur K. et quelques-uns de ses camarades qui lui ont soumis quelques idées grinçantes. Le Monde est un Joyeux Cimetière est le nouveau projet Ulule du co-auteur des Chroniques anachroniques. En solo, cette fois, Monsieur K. nous embarque dans un voyage à travers l’humour noir qui n’épargne aucun thème passé ou contemporain : l’attaque des Tours jumelles new-yorkaises, la guerre, les accidents de chasse ou de circulation, ou plus simplement des scènes de la vie quotidienne délirantes, tout y passe. Un seul ingrédient compte : une mort avec panache !

Page de l'album Le Monde est un joyeux cimetière — © Le Monde est un joyeux cimetière – Monsieur K. – Tapage

Dans ces cases en noir et blanc, une seule couleur sort du lot : le rouge ! Il teinte bien évidemment les éclaboussures d’hémoglobine, mais également tout objet dangereux de notre monde moderne : la dynamite de Monsieur Nobel, le bouton nucléaire de la première puissance mondiale ou encore un simple panneau “stop”, témoin d’une collision violente entre deux voitures.

Un joyeux cimetière sans tombe

La variété des situations et des intrigues mène une partie des protagonistes en direction de la mort sans équivoque et sans douceur, mais sans doute rarement vers le cimetière. Écrabouillés, découpés en morceaux ou bastonnés, les personnages sont malmenés et très certainement plus souvent incinérés qu’enterrés (encore faut-il parvenir à récupérer les bouts de chair qui traînent un peu partout).

Toutefois, il serait injuste de réduire ces strips à une succession de cases violentes et horribles. Le lecteur curieux et observateur s’interrogera sur des séquences propices à la réflexion : que se passe-t-il dans la tête d’un pilote de guerre qui vient de larguer une bombe sur des civils ? Le terroriste ceinturé de dynamites n’est-il qu’un lâche ? On y dénonce également la violence policière, la stupidité d’un président américain ou plus simplement la critique facile de monsieur ou madame tout le monde face à la cigarette (alors qu’on s’empiffre de pâtisseries au risque de se choper un bon diabète).

Dans le dessin de Monsieur K., il y a parfois un petit côté Vuillemin pour représenter l’horreur de la mort “crade” et des scènes violentes. Quand ce n’est pas le dessin sanglant qui dicte l’indignation et le rire gêné du lecteur, ce sont les féroces et ubuesques dialogues qui le dérident. Le propre de l’humour noir est de se laisser porter par l’histoire, sans honte et sans tabou. Plutôt que de s’effrayer de la mort, rigolons-en un bout coup !

Chronique écrite par Bruce RENNES