La Fleur des Absents

Les éditions Casterman publient La fleur des absents de John Moore, auteur et dramaturge anglais, secondé par Neetols, illustrateurice et graphiste qui vit aux Philippines. Tous deux font, avec ce roman graphique à destination des adolescents, leur première incursion dans le monde de la BD.

Casterman La fleur des absents 2025 couverture

©Casterman – La fleur des absents – John Moore, Neetols – 2025

Aux frontières du réel

Le deuil est un processus qui peut prendre du temps et c’est le cas de Damian. Dix ans après le décès de sa mère, sa douleur est toujours vive. La nouvelle famille de son père, qui a refait sa vie, l’a rejeté et il vit désormais chez son grand-père. Obligé de changer de lycée, il a du mal à s’intégrer. Un jour, il voit une publicité pour « la fleur des absents » qui permettrait de ramener à la vie une personne disparue, le temps de la floraison. Quand il peut enfin se l’offrir, il décide d’aller se recueillir sur la stèle de sa mère et tenter d’invoquer son esprit. Contre toute attente, il se retrouve avec celui de Saskia, une petite fille au caractère trempé et à la mort chargée de mystères. Débute alors une cohabitation forcée.

Casterman La fleur des absents 2025 planche

©Casterman – La fleur des absents – John Moore, Neetols – 2025

Cette touche fantastique est le point de départ d’une histoire où la réalité de l’adolescence et le surnaturel s’entremêlent. Ce récit, sensible, offre une réflexion sur les souvenirs que l’on garde de nos proches et sur les fêlures qu’ils nous laissent. Bien que les thèmes abordés soient sombres, les personnages sont attachants et tout particulièrement Saskia, qui donne un souffle de légèreté subtil au scénario.

©Casterman – La fleur des absents – John Moore, Neetols – 2025

Et s’il était possible de faire revenir les morts, le temps de la vie d’une fleur ?

Un soupçon de mystère entoure la mort de la mère de Damian et surtout celle de Saskia. La touche fantastique du pouvoir de la fleur des absents donne de l’originalité au scénario qui veut traiter de beaucoup de thèmes chers à l’adolescence (la quête d’identité, la découverte de l’amour) et propre à Damian en particulier (les dysfonctionnements familiaux, la perte d’un proche). Malgré une intéressante réflexion sur le deuil et sur la nécessité de se reconstruire, le récit n’est pas complément abouti et la fin, un peu abrupte, laisse quelques questions liées au décès de la petite fille, en suspens.

Le dessin de Neetols privilégie la fluidité de la lecture avec des personnages simples, certes expressifs mais sans trop de détails. Si la couverture est travaillée et lumineuse, les décors des pages intérieurs sont plus sobres. La colorisation, en revanche est très réussie et joue un rôle important. Elle diffuse une ambiance douce et mélancolique qui fait écho au quotidien de Damian.

Casterman La fleur des absents 2025 planche 82

©Casterman – La fleur des absents – John Moore, Neetols – 2025

Certaines bulles semblent trop grandes pour le texte, écrit entièrement en majuscule, ce qui perturbe un peu la mise en page. Peut-être est-ce dû à la traduction du texte ou à la toute jeune expérience de l’illustrateurice ?

La cohabitation forcée de Damian et Saskia est haute en couleur pour ces deux personnages que tout semble opposer. Obligés de démêler les mensonges et les non-dits, ils finiront par découvrir que leurs parcoursne sont finalement pas si éloignés.
La Fleur des absents est un roman graphique sensible, imparfait, mais profondément touchant. Dans ce récit la mémoire des disparus n’empêche pas de se construire mais doit au contraire nourrir ce que nous devenons.