Chasseuse de fantômes
Quand on est adolescente et qu’on doit traquer les fantômes avec son père qui en a fait son métier, il y a de quoi être furieuse. Pourtant, dans Chasseuse de fantômes paru aux éditions Jungle, Chelsea en apprend beaucoup sur elle-même, sur l’amour et sur l’histoire locale au sein d’un manoir hanté.
Alors qu’elle intègre un lycée de jeunes élèves privilégiés habitués à se pavaner et à faire la fête, Chelsea, une jeune femme noire de peau, tente tant bien que mal de faire partie de la bande. C’est sans compter sur son père passionné de paranormal qui l’oblige, comme punition suite à une bêtise, à l’accompagner lui et sa société dans l’une de ses missions de chasseur de fantôme. Un riche propriétaire fait appel à eux pour faire partir à tout prix les fantômes qui hantent son manoir, une ancienne plantation où travaillaient des esclaves noirs, et risquent d’en empêcher la reconversion en un digne hôtel-boutique de la Nouvelle-Orléans.
Chelsea n’en croit pas ses yeux lorsqu’elle tombe nez à nez avec des êtres d’une autre époque. Bientôt, elle s’intéresse à leur histoire, liée à celle de l’esclavage. Tout en aidant son père, la jeune fille aura un choix à faire entre sauver les apparences, soutenir sa famille ou suivre son cœur, le temps d’une mission. Une chose est sûre, sa vision des choses ne sera bientôt plus comme avant.
Une histoire paranormale sur fond de romance et de traite des noirs
Au scénario de ce one-shot, les jumelles américaines Shawnelle et Shawnée Gibbs et Emily Cannon nous plongent dans une riche intrigue mêlant la vie d’une adolescente ordinaire aux activités paranormales de son père.
Une jeune ado différente de par sa couleur de peau et de par sa situation familiale, doit se faire apprécier de riches privilégiés tout en restant fidèles à ses parents, et surtout à un père dont les activités paraissent risibles de prime abord. L’action se concentre rapidement sur la chasse aux fantômes à proprement parler et l’histoire locale liée au manoir prend bientôt le pas sur le reste, tout en se teintant de romance. Une tragédie du passé sera révélée…
Chasseuse de fantômes est riche en rebondissements mais ne se lit pas forcément d’une seule traite, on a le temps d’apprécier l’intrigue et les personnages, tout en ayant nettement l’impression de regarder un film plus que de lire une bande dessinée. Pourtant, tous les ingrédients d’une BD jeunesse actuelle sont présents. Le ton est plus comique que tragique, les péripéties s’enchaînent avec rythme, et les visages ne manquent jamais d’expressivité.
Un manoir hanté plein de charmes
Chasseuse de fantômes ayant plutôt pour cible un public de jeunes adolescentes, les lieux et les personnages représentés ont un petit quelque chose de girly et de romantique. On apprécie beaucoup la représentation du manoir et des jardins dans lesquels la jeune fille se retrouve à poursuivre les esprits dans le dos de son père. Les auteurs n’ont pas manqué d’intégrer un chat-fantôme assez mignon, sans être kawai. Aishwarya Tandon aux couleurs privilégie les couleurs vives, avec une dominante de mauve et, pour les fantômes, un bleu clair qui rend le tout très lisible.
Cette histoire extraordinaire est tout sauf statique. En jouant notamment sur la superposition des cases, les auteurs donnent beaucoup d’animation à l’ensemble. Des scènes de jour succèdent à des scènes de nuit, des cases sont centrées sur des élements de détails, des planches sont consacrées à l’histoire du manoir… le lecteur ne s’ennuie jamais grâce à toute cette variété, sans jamais perdre le fil. Autre particularité, les traits des personnages sont tantôt détaillés, tantôt simplifiés, au point de ne pas représenter leurs cheveux sur certaines cases se concentrant davantage sur le dialogue, ce qui est assez déconcertant.
Chasseuse de fantômes est un album jeunesse qui plaira surtout aux jeunes adolescentes, ayant une certaine prédilection pour les romances et les histoires de fantômes qui sont plus drôles qu’effrayantes. Cette aventure parlera aussi à tous ceux qui ont une famille un peu excentrique qu’il faut apprendre à assumer et qui peinent à trouver leur place à l’école. La plus-value en est bien entendu la réflexion historique sur l’esclavagisme.
Chronique écrite par Aurélie DORCHY
Informations sur l’album
- Scénario : Shawnee Gibbs
- Dessin : Emily Cannon
- Couleurs : Emily Cannon
- Éditeur : Jungle
- Date de sortie : 2 mai 2024
- Pagination : 224 en couleurs
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