À mourir entre les bras de ma nourrice
Après GoST 111 et Cristal 417, Mark Eacersall et Henri Scala se retrouvent pour un nouveau polar réaliste se déroulant dans une cité minée par les trafics, mis en dessins par le débutant Raphaël Pavard.
©Glénat, 2024 – A mourir entre les bras de ma nourrice – Mark Eacersall, Henri Scala et Raphaël Pavard
Fatoumata est une femme de ménage célibataire avec trois enfants. Elle habite dans un immeuble HLM d’une cité dans laquelle les trafiquants ne se cachent même pas. À court d’argent, Fatoumata doit accepter de jouer la « nourrice » pour les truands, c’est-à-dire qu’elle garde un coffre rempli de drogues dans son appartement.
©Glénat, 2024 – A mourir entre les bras de ma nourrice – Mark Eacersall, Henri Scala et Raphaël Pavard
A mourir entre les bras de ma nourrice : une histoire terre-à-terre
Les lecteurs qui se souviennent de Cristal 417, précédente œuvre du duo Eacersall-Scala, se rappelleront le côté réaliste et donc terre-à-terre du livre : à travers les yeux d’une jeune policière arrivant à la brigade criminelle de Paris, le lecteur découvrait le quotidien des policiers. Les auteurs en profitaient pour tordre le cou à certaines idées reçues comme par exemple le « fichier du grand-banditisme »… qui n’a jamais existé.
Rien d’étonnant donc de retrouver le même ton ici mais avec le regard d’une civile. Le scénario évite tout manichéisme : tous les personnages y compris les policiers ont leur part d’ombres et n’hésitent pas à tirer profit de la situation quand ils le peuvent. Ainsi, l’un d’entre eux va faire pression sur Fatoumata pour qu’elle donne les numéros de téléphone des membres des gangs de la cité, au péril de sa vie.
Outre l’aspect polar, les auteurs en profitent aussi pour parler des violences faites aux femmes via le personnage de la meilleure amie de Fatoumata : Khadija battue par son mari qui se dit pieux et honnête.
Le rythme est bien maîtrisé, l’album fait 104 pages mais le lecteur ne les voit pas passer tant les péripéties et retournement de situations s’enchaînent d’une manière assez fluide. Il y a cependant un petit hic : avec une histoire aussi réaliste, la fin ne semble pas très crédible.
©Glénat, 2024 – A mourir entre les bras de ma nourrice – Mark Eacersall, Henri Scala et Raphaël Pavard
Les débuts de Raphaël Pavard
Il s’agit du premier album de bande dessinées de Raphaël Pavard qui, non seulement signe les dessins, mais aussi les couleurs.
Certains chroniqueurs ont comparé le travail de Pavard avec celui de Baru et Hermann. Il faut bien admettre qu’il y a un petit quelque chose qui rappelle l’auteur de Jeremiah, mais Pavard a encore du chemin à faire avant d’arriver à la hauteur du maître. Son trait se met au diapason du scénario : réaliste. Mais le traitement des couleurs à l’aquarelle l’est moins. C’est pourtant là qu’une certaine poésie aurait pu venir transcender le récit mais le choix des couleurs reste trop sage ou trop timide pour le permettre. Dommage.
©Glénat, 2024 – A mourir entre les bras de ma nourrice – Mark Eacersall, Henri Scala et Raphaël Pavard
Un polar qui s’assume
À mourir entre les bras de ma nourrice a pour lui un scénario réaliste, inspiré par l’expérience professionnelle de Scala, le point de vue de sa protagoniste, son refus du manichéisme, un rythme maîtrisé et un dessin déjà bien affûté.
Il s’en dégage une impression de polar qui s’assume jusqu’à cette fin qui semble en contradiction avec le ton de l’album et c’est bien malheureux parce que sans ça, il réalisait un sans faute.
Une chronique écrite par : Frédéric P.
Informations sur l’album :
- Scénario : Mark Eacersall et Henri Scala
- Dessins : Raphaël Pavard
- Couleurs : Raphaël Pavard
- Éditeur : Glénat
- Date de sortie : Le 10 janvier 2024
- Pagination : 104 pages en couleurs