Fassbinder – L’Homme qui voulait qu’on l’aime
La collection 9 ½ (en référence au film 8 ½ de Federico Fellini) des éditions Glénat propose plusieurs romans graphiques retraçant la vie et l’œuvre d’acteurs ou de réalisateurs célèbres. Après, entre autres, Hitchcock, Lino Ventura, Truffaut et Gabin, c’est au tour du prolifique réalisateur allemand Rainer Werner Fassbinder d’être célébré par Noël Simsolo (scénario) et Stefano d’Oriano (dessins et couleurs).

Né en 1945 en Allemagne, Rainer Werner Fassbinder va très vite se passionner pour le septième art. Refusé par l’école du cinéma de Berlin, il va se tourner vers le théâtre et commencer à tourner des films avec sa petite troupe d’acteurs.
Fassbinder va ainsi réaliser plus de 40 films en 13 ans ! Un rythme fou qui semble vital à Fassbinder. S’il s’arrête… il meurt. Ce qui arrivera en 1982 alors que le réalisateur était âgé de 37 ans et qu’il venait de remporter l’Ours d’or du Festival de Berlin.

Une narration basée sur le dialogue
Noël Simsolo est, entre autre, historien du cinéma mais aussi scénariste de plusieurs albums de bande dessinée. Parmi tous les titres parus dans la collection 9 ½, Simsolo en a scénarisé six !
La difficulté de ce genre d’ouvrage est de rendre justice à l’œuvre du personnage principal ce qui est très difficile lorsque l’œuvre en question est conséquente. Ainsi l’album consacré à Jean Gabin, dont la carrière compte 95 films, donnait l’impression d’être rushé et ne rendait pas vraiment hommage à la carrière du « pacha ».

On pouvait donc avoir quelques appréhensions sur cette biographie dessinée de Fassbinder puisqu’il a enchaîne les projets durant toute sa carrière. Malheureusement, les appréhensions étaient justifiées : après un début d’album très réussi retraçant la jeunesse de Fassbinder, Simsolo passe d’un tournage à un autre en une planche, parfois moins, ce qui déroute le lecteur. On regrettera aussi la tendance à raconter l’action par le dialogue plutôt qu’en passant par une représentation visuelle.
Une autre difficulté est le nombre important de personnages différents, notamment la troupe de l’ « Antiteater », pas toujours bien différenciés les uns des autres ce qui ajoute à la confusion.
Cela dit tout n’est pas à jeter : l’album dépeint bien la psychologie de Fassbinder et ses relations pas toujours faciles avec son entourage. Une pensée toute particulière pour la pauvre Irm Hermann qui aura subi les pires humiliations du cinéaste.

La révélation Stefano d’Oriano
Diplômé en art graphique de l’Académie des Beaux-arts de Naples, il s’agit du premier album de Stefano d’Oriano pour Glénat. On espère qu’il y en aura d’autres pour le dessinateur italien car ses planches ont quelque chose qui capte l’attention. Dans un style semi-réaliste justifié par le fait que l’album compte 224 pages (sinon l’album serait toujours en cours de réalisation), d’Oriano rend ses planches très lisibles.
Les couleurs ont été réalisées par d’Oriano lui-même. Elles sont très réussies et participent avec le découpage à la création d’une atmosphère entre le clair et l’obscur comme si les personnages étaient partagés entre leur part d’ombre et leur part de lumière.

Un roman graphique pour qui ?
À qui pourrait-on recommander des romans graphiques retraçant l’œuvre de grands acteurs ou réalisateurs ? Aux non initiés ? Un lecteur vierge de toute connaissance sur l’histoire du cinéma risque d’être vite perdu dans ce labyrinthe de personnages inconnus et de films qu’il n’a jamais vus.
Aux cinéphiles ? Ils seront vite frustrés par tous les détails passés sous silence ou survolés malgré des albums de plus de 200 pages !
Alors ? Il reste ceux qui combinent passion du cinéma et de la bande dessinée qui seront ravis de voir leurs acteurs ou réalisateurs préférés faire l’objet d’un roman graphique. Surtout lorsqu’ils sont mis en dessins avec talent !

Chronique écrite par Frédéric P.
Informations sur l’album
- Scénario : Noël Simsolo
- Dessin : Stefano d’Oriano
- Couleurs : Arancia Studio
- Éditeur : Glénat « 9 ½»
- Date de sortie : 15 mai 2024
- Pagination : en couleurs