Rétro – Le Retour de Choc – T5 de Tif et Tondu
Deux détectives amateurs aux physiques étonnants, reconnaissables entre mille ; un génie du Mal tiré à quatre épingles ; une invention à protéger ; de multiples rebondissements dans une atmosphère de Cluedo coloré et grandement sympathique : telle pourrait être la définition d’une aventure type de Tif et Tondu. La série, apparue dès le premier numéro du « Journal de Spirou » en 1938 est un emblème des éditions Dupuis jusqu’à son arrêt en 1997. Elle a particulièrement marqué les lecteurs par le personnage fascinant d’antagoniste qu’auront à affronter nos deux héros à de nombreuses reprises : Monsieur Choc, énigmatique personnage, empereur du crime, insaisissable et mystérieux, toujours recouvert d’un heaume impressionnant. Et dans Le Retour de Choc, ce 5ème album de la collection, Tif et Tondu vont devoir déployer tous leurs talents pour se mesurer à lui à nouveau.
Alors qu’ils se reposent dans une belle villa de la Côte d’Azur, nos deux amis reçoivent une lettre énigmatique d’un certain Comte del Marco demandant leur aide et protection. L’homme, puissant industriel propriétaire de chantiers navals, est sur le point de lancer un modèle ultra-moderne d’hydroglisseur qui pourrait révolutionner le marché. A quelques jours de la fin de la mise au point de l’engin, il est toutefois la cible de menaces de « La main blanche », l’organisation de Choc que Tif et Tondu pensaient avoir démantelé à la fin de l’album précédent. Intrigués par cette affaire, les deux détectives acceptent d’aider le Comte et rejoignent celui-ci dans l’île de Calsi où les derniers tests et réglages sur l’hydroglisseur sont effectués. Tif et Tondu sont logés dans l’immense château de del Marco au décorum impressionnant et empli de passages secrets et de recoins insoupçonnables. Accompagnés de l’équipe rapprochée de l’homme d’affaires ainsi que d’un curieux inspecteur, les deux héros vont devoir redoubler d’attention pour confondre Choc dont la présence rode tout au long de l’aventure.
Dans cet épisode publié en 1955 dans « Le journal de Spirou » et édité en album deux ans plus tard, le scénariste M. Rosy pose les bases de ce qui fera le succès de la série. Après avoir introduit Choc et son organisation criminelle dans le tome précédent, il orchestre ici le retour de l’ennemi préféré de Tif et Tondu, dans une sorte de huis clos délectable. Sur une île isolée, les deux personnages vont, pendant toute la durée de l’histoire, être aux aguets et courir un peu partout pour essayer de confondre un gangster invisible mais dont l’omniprésence est quasiment palpable tout au long des 48 pages de la BD à l’atmosphère quelque peu angoissante. De coup de théâtre en fausse piste, d’espoir déçu en gag involontaire, les détectives entrainent tambour battant les lecteurs dans leur quête afin de savoir enfin qui est Monsieur Choc.
Cet album est un classique représentatif du fameux « âge d’or » de la BD. De ceux qui tiennent les enfants en haleine par leurs multiples péripéties – parfois un peu grand guignolesques – ou rebondissements, et qui ravissent les adultes, heureux de pouvoir trouver une lecture entrainante et sans prétention aucune comme exutoire à des journées difficiles. « Le retour de Choc » n’est en effet pas façonné pour la réflexion ou pour étudier la psychologie des personnages. Il est uniquement fondé sur l’action, la volonté d’évasion et de divertissement. Le contrat est rempli par le scénario vivace et prenant, mais aussi par les couleurs franches, vives, sans nuances mais attractives et attirantes, renforçant le sentiment du bonheur de la lecture. Le dessin simple et efficace de Will, immédiatement appréhendable, extrêmement lisible et d’emblée familier donne un sentiment instantané de proximité. Par son trait si caractéristique d’une époque et d’un courant de dessin, le père d’Eric Maltaite nous emmène en pensée vers les temps rassurants et légendaires du mythique « Spirou » de Delporte et du « Fab 4 ».
« Le Retour de Choc » se lit ainsi comme on déguste un gâteau qu’on adorait durant l’enfance et qu’on a un peu oublié depuis : il apporte les saveurs de périodes lointaines, mais ancrées dans notre imaginaire et ouvre un passage sur un temps que tous les amateurs de BD portent en eux. Une belle façon de voyager pour les vacances d’été !
Chronique écrite par Mathieu DEPIT
Informations sur l’album
- Scénario : Maurice Rosy
- Dessin : Will
- Éditeur : Dupuis « Tous publics »
- Date de sortie : 1957 pour la première édition – 13 mars 1986 pour l’édition actuelle
- Pagination : 48 en couleurs
- Format : 218 x 300
