La grande aventure de Pepik

Nommée dans la sélection jeunesse de l’édition 2025 du Festival International de Bande dessinée d’Angoulême (FIBD), La Grande Aventure de Pepik, publiée aux Éditions de l’Oeuf en France, s’offre une visibilité et une chance de notoriété internationale qu’elle a déjà rencontrée en 2013 au niveau national dans son pays d’origine, la Tchéquie. Avec cette histoire originale en forme de voyage initiatique entre imaginaire et réalité, Pavel Cech dévoile un chemin vers la sortie de l’enfance et révèle tout son talent, méconnu du grand public français.

La grande aventure de Pépik Pavel Cech couverture

Pépik est un jeune garçon sage, frêle, timide, manquant de confiance en lui et un peu bègue. Moqué par les autres enfants, il se referme sur lui, se réfugie dans les romans d’aventure et s’assoit au fond de la classe pour mieux rêver aux mondes imaginaires et lire en cachette. Un jour, Elzevire, une nouvelle élève, arrive dans son école et s’installe à côté de lui pour suivre les cours. Belle et dégourdie, audacieuse, courageuse et pleine d’assurance, elle partage le même goût pour les livres que Pépik. Les deux jeunes gens se lient rapidement d’amitié et deviennent inséparables. Cette relation bouleverse totalement la vie de Pépik jusqu’à l’entraîner dans une grande aventure bouleversante et dans laquelle chaque lecteur pourra s’identifier.

La grande aventure de Pépik Pavel Cech planche

Qui est Pavel Cech, figure de proue de la BD tchèque ?

Peu connu en France, Pavel Cech est un auteur majeur de la bande dessinée tchèque. Né en 1968, il dessine depuis sa plus tendre enfance, un peu comme son héros Pépik, en cachette en se tenant au fond de la classe. A l’époque de la Tchécoslovaquie, les enfants ignoraient pourquoi, mais les Rahan, Thorgal, Pif ou encore le magazine yougoslave Stripoteka, étaient inaccessibles. Ils les désiraient si forts que c’était comme une monnaie d’échange, les poussant à les recopier pour se les prêter ou a essayer de les créer eux-mêmes. Adulte, muni de son diplôme de serrurier mécanique, Pavel a travaillé en usine puis 15 années comme pompier, durant lesquelles son chef l’encourageait à dessiner pendant les moments calmes.

Et puis en 1989, il y a eu la révolution de velours qui précipita la chute du régime communiste tchécoslovaque. Ayant un revenu régulier, Pavel envoya ses dessins un peu partout, mais les magazines avaient le plus souvent cessé d’exister. Il n’expédiait que des planches originales, représentant jusqu’à un mois de travail, sans avoir beaucoup de réponses et sans qu’elles lui soient retournées. C’était une période de pionniers.

Un jour Le Jardin, un livre qu’il avait écrit et sans qu’il comprenne trop pourquoi, avait été publié en France, était exposé dans la vitrine d’une librairie à Grenoble. Petr Novolny, qui passait par là, fût attiré par le nom de son compatriote sur la couverture. Découvrant et appréciant le travail, il contacta Pavel. Aujourd’hui, Petr édite les livres de Pavel en Tchéquie et les deux hommes sont amis depuis plus de 20 ans. Auteur autodidacte, Pavel Cech à reçu plusieurs prix dont celui de la meilleure BD tchèque en 2013 pour La Grande Aventure de Pépik et à présent, publié en France par les Éditions de l’Œuf, son livre est en lice pour le prix BD jeunesse du FIBD 2025.

Une aventure riche par un auteur complet

Cette bande dessinée est intéressante à plus d’un titre. Tout d’abord elle traite d’une thématique qui résonne aussi bien dans l’esprit des plus jeunes que des adultes : la sortie de l’enfance. Tous les aspects du sujet sont abordés, de comment affronter ses peurs à la naissance de la première amitié en passant par l’apprentissage du courage, de la confiance en soi ou à comment être l’acteur de sa propre vie.

Ensuite avec son graphisme reconnaissable entre tous, qui peut paraître très simple voir enfantin, le trait devient vite poétique, sombre et fantaisiste. Il y a ces regards très expressifs qui permettent de lire les émotions de Pépik. On trouve çà et là des symboles qui illustrent parfaitement toutes les problématiques comme le labyrinthe qui représente le parcours initiatique que l’enfant traverse tel un voyage vers son centre pour une entrée dans le monde. L’auteur à aussi pioché dans sa propre vie et mis de lui même dans son dessin. La coiffure de Pépik qui fait obligatoirement penser à celle de l’artiste en est l’exemple parfait.

Enfin il y a toutes ces nuances et ces lavis de bleus, de gris, de verts et d’ocres qui accentuent l’impression de monde flou dans lequel vit Pépik. Le monde réel se confond avec les mondes imaginaires de l’enfant, lui permettant ainsi d’accepter son existence dans cette vie qu’il ne comprend pas bien et dans laquelle il n’arrive pas à s’intégrer. De temps à autres, des pages plus claires de moments partagés avec Elzevire font ressentir la joie des deux enfants pour mieux les extirper de l’univers de Pépik ou les y replonger.

La Grande Aventure de Pépik et un voyage initiatique vers la sortie de l’enfance dans laquelle jeunes (à partir de 10 – 12 ans) et adultes retrouveront forcément un peu d’eux mêmes. Tout comme Pépik, le lecteur se sent perdu, ne sachant pas où cette histoire le conduit et perçoit ainsi d’autant mieux les émotions du garçon. Il est à souhaiter que la nomination de La Grande Aventure de Pépik au prix jeunesse du FIBD 2025 lui offrira la visibilité qu’il mérite auprès du grand public.