Raven, tome 3 : Furies

Très librement inspiré d’une nouvelle de Robert E. Howard, le papa de Conan le Cimmérien, Raven se conclut avec ce troisième tome au nom très prometteur : Furies. Après les 52 planches du premier épisode et 58 dans un deuxième qui se fermait sur un climax intense, Mathieu Lauffray entraîne le lecteur dans 78 pages d’action presque non-stop.

Raven, accompagné par Anne et Arthur, les enfants du comte de Montignac, revient au fort de celui-ci pour découvrir le navire « le Capricorne » échoué sur la plage. Pourtant, jusqu’ici, son plan s’était déroulé parfaitement : l’impitoyable Lady Darksee laissée pour morte dans les vapeurs toxiques du volcan et le trésor récupéré. Il ne restait plus qu’à fuir à bord du navire avant l’arrivée des tribus cannibales en quête de vengeance. Une terrible bataille se prépare, un combat pour survivre.

Le pire raté des Caraïbes ?

Le scénario de Mathieu Lauffray brille clairement par la richesse de ses personnages et leurs interactions. Derrière son côté lourdingue, Raven cache une profondeur insoupçonnée. Son enfance est d’ailleurs évoquée dans ce troisième album, avec quelques trop courtes pages montrant des événements tragiques qui apportent une nouvelle dimension à un personnage qui a tout de l’anti-héros : fourbe, menteur, faillible, avide… Lady Darksee est également une grande réussite, charismatique, impitoyable, mais avec quelques problèmes à gérer sa colère…

La capitaine et Raven forment un duo d’antagonistes parfaits, créant des scènes de grande tension. Les seconds rôles sont plutôt définis par leur fonction : le gouverneur fier, sa fille, jeune et rebelle, le petit frère impétueux qui va générer périls et solutions, le second brutal de Darksee… Ce qui pourrait être vu comme un défaut du scénario en est finalement une force : la narration est centrée sur le duo principal et la caractérisation simple des personnages secondaires permet d’éclaircir un récit très dense.

Le feu et… le feu aussi

En effet, il s’en passe des choses dans cet album. Si le premier tome de Raven pouvait lorgner vers la saga filmique Pirates de Caraïbes avec un personnage principal très compétent mais quelque peu ridiculisé par sa nonchalance et son apparente bêtise, le second épisode gagnait en sérieux, en dramatique et en intensité. Cette conclusion, la bien nommée Furies, va dans le même sens avec un récit haletant alternant scènes d’action mémorables et dialogues sous pression avant un final grandiose de plus de vingt planches, que ce soit dans sa narration ou dans sa mise en images.

Depuis Long John Silver, avec Xavier Dorison au scénario, l’illustrateur Mathieu Lauffray n’avait plus rien à prouver dans l’univers des pirates. Son dessin est l’une dans grandes réussites de la trilogie Raven. Ses personnages, principaux comme secondaires, dégagent un charisme indéniable qui colle parfaitement à la tension des événements dans lesquels ils sont baladés, et le dessinateur leur offre quelques cases tout simplement emblématiques, à l’image de la couverture de chaque album. Les décors sont superbes et complètement immersifs, avec une mention spéciale pour le navire le Capricorne aux détails bluffants. Les couleurs, assez classiques, sont maîtrisées à la perfection par Mathieu Lauffray lui-même, notamment dans son travail de la lumière. Les séquences d’incendies sont à ce titre de pures merveilles graphiques.

Série de pirates ayant la particularité de se dérouler principalement sur terre, la trilogie de Mathieu Lauffray se conclut en apothéose avec des scènes d’une tension impressionnante à la mise en scène cinématographique riche en moments iconiques. Narration, dessin et couleurs se marient à la perfection pour un final digne des attentes que les deux premiers tomes pouvaient laisser espérer. Raven va clairement nous manquer.

Chronique écrite par : Cédric « Sedh » Sicard