Mes biens chers frères, mes biens chères sœurs, trois ans après le très beau Tananarive, Sylvain Vallée collabore avec Jacky Schwartzmann au scénario et Elvire de Cock aux couleurs, pour nous présenter une fiction à contre courant de la précédente. Avec le titre évocateur d’Habemus Bastard, le trio nous offre un polar qui laisse s’exprimer le «style Sylvain Vallée».
Lucien, homme de main professionnel à la morale blasphématoire et avec le bon sens d’un gangster, n’a jamais commis d’erreurs, jusqu’à ce qu’il entre dans la chambre 311 de l’hôtel du temple. S’en remettant au hasard plutôt qu’à sa destinée, il enfile une soutane et fait vœu de cavale dans un petit village du Jura où, pour se cacher, il joue le rôle du père Philippe qui était très attendu et que personne n’avait jamais vu. Sa personnalité, son besoin d’argent et son inventivité vont rapidement influencer la vie des paroissiens de tous âges et de tous rangs. Avec un scénario aux dialogues ciselés et dans lequel le Polar fait bon ménage avec les situations cocasses, le plaisir de lecture est certain.
Un titre évocateur
Habemus Bastard, un titre qui claque comme celui d’un film du box office. La référence au cinéma de Nanni Moretti et de Quentin Tarantino semble évidente. Ce mash-up cinématographique entre Habemus Papam et Inglorious Bastard donne naissance au personnage de Lucien : un prêtre très attendu qui n’est pas prêt à supporter le poids de cette responsabilité mais qui est avant tout le père des actions punitives sanglantes.
Le style Sylvain Vallée
Au premier coup d’œil nous reconnaissons le coup de crayon de Sylvain Vallée avec les visages tout en rondeurs et le trait appuyé des expressions. Ce style de dessin permet d’offrir une large gamme de sentiments qui donnent vie aux personnages.
Les décors et l’ambiance créés, renforcent davantage l’impression de polar sombre que la reproduction du village de Saint Claude qui se voit amputé de sa cathédrale pour la remplacer par l’église de l’Assomption d’Orgelet, car très certainement plus en cohérence avec l’histoire.
Enfin, ce récit facilite l’introduction des thèmes qu’affectionne l’auteur. Il en profite donc pour développer une galerie variée de personnages, du plus brutal au plus tendre, issu de différentes classes et mœurs sociales, faisant ainsi ressortir toute la diversité de la société.
Ce premier tome d’Habemus Bastard, l’être nécessaire, plante le décor et l’histoire, propices à un humour noir et amoral, nous rappelant celui des films de Georges Lautner avec des expressions qui font mouches. Il ne fait pas de doute que les évènements vont se précipiter et venir bouleverser la quiétude de la paroisse dans le second et dernier tome prévu en octobre 2024.
Chronique écrite par Xavier G.
Informations sur l’album
- Scénario : Jacky Schwartzmann
- Dessin : Sylvain Vallée
- Couleurs : Elvire De Cock
- Éditeur : Dargaud
- Date de sortie : 3 mai 2024
- Pagination : 88 en couleurs
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