Apogée, les boucles de Celadön, est la nouvelle série SF du Trio F. Duval / Emem / F. Blanchard. Prévue en 3 volumes, Apogée est présentée comme le préquel de Renaissance, fresque en 6 tomes de science-fiction, récemment achevée mais qu’il n’est nul besoin de connaître pour apprécier ce «space opera». Le trio d’auteurs nous offre un voyage dans le temps et l’espace, fait de moult civilisations, de héros inattendus qui, malgré eux, vivent des aventures dans des mondes étranges, aussi magnifiques que terribles et qui, en proie aux plus horribles instincts, révèlent un courage à toutes épreuves.
La planète Ötöne est à des centaines d’années lumière de la Terre. Elle est vierge de toute civilisation technologique et elle est protégée par la charte du Complexe (genre d’ONU interplanétaire). La seule présence autorisée, sont les générateurs interzones qui permettent aux vaisseaux spatiaux de se téléporter et le personnel de maintenance tel Jacc, habitant de la planète Kerath.
Jacc offre la chance à Jadd et Tomm, ses deux enfants, de randonner au milieu des beautés inégalées de cette terre sauvage et sans dangers, pendant qu’il inspecte un générateur défaillant qui empêche le vaisseau consulaire en orbite d’effectuer un saut interzone. En même temps qu’il découvre que l’appareil a été piraté, le technicien est pris d’effroi par on ne sait quoi. Les deux adolescents, quant à eux tombent nez à nez avec des êtres non répertoriés à l’apparence humaine et primitive. A leur peur s’ajoute l’inquiétude de ne pas réussir à contacter leur père.
En parallèle, à quelques secondes de la téléportation, le consul Moussa s’apprête à faire une déclaration d’une gravité absolue au Complexe, tout en refusant, par manque de temps, de répondre à l’appel à l’aide d’Eliz, une journaliste de la planète Ouröbörös. Prise en chasse par ses congénères qui l’accusent de traîtrise, elle déclare détenir des informations capitales. Alors que le vaisseau consulaire emprunte la fenêtre de saut, celle-ci se referme sur lui et le coupe en deux, au même instant la navette de la lanceuse d’alerte, touchée par les chasseurs s’écrase sur Ötöne.
De la science-fiction avec des sujets contemporains
Ce nouveau récit reprend l’univers futuriste de la série Renaissance avec une action qui se déroule cette fois-ci très loin de la Terre, à une époque reculée. Pour autant, les situations et problématiques des différents protagonistes extra-terrestres sont très contemporaines de celles des lecteurs. Ainsi, avec en toile de fond les dissensions et les luttes entre des populations différentes, plus fortes ou plus faibles, des sujets tels que le divorce, l’opposition des classes, l’exploitation des ressources et la préservation de la nature sont au cœur de l’histoire.
De cette façon, Jacc, habitant de la planète la plus pauvre du Complexe est divorcé et pratique la garde alternée avec la mère de ses enfants qui « est chez les riches pour travailler ». Jadd et Tomm quant à eux ont les mêmes préoccupations que les ados terriens de 2025 c’est à dire avoir du « rézo ». Eliz dans son rôle de lanceuse d’alerte est coincée entre ceux qu’elle dénonce et les autres qui ne l’écoutent pas. L’image apaisante de la planète Ötöne ne fait qu’accentuer l’urgence du drame qui se joue au dessus d’elle et qui vient la frapper brutalement avec le crash d’Eliz. Incident qui marque le point de départ de l’opposition entre la préservation de l’environnement et des populations privilégiée par le Complexe et les Ouröbörös dont le paradigme est basé sur l’exploitation sans limite des ressources à l’image de leur continent urbain Törö.
Un dessin visionnaire très design
Le lecteur, avec par exemple la case en vue plongeante sur la région du lac d’Ötöne (p.6-c.3), observera avec plaisir des paysages extraterrestres luxuriants aux étendues vastes et dont la richesse des teintes vives accentue la beauté en parfaite contradiction avec les couleurs sombres d’Ouröbörös, des vaisseaux, vêtements, robots et armes de guerre.
Le travail sur l’architecture des édifices, le design des vaisseaux, soucoupes, navettes et véhicules en tous genres apportent sans conteste un vrai plus et contribue largement à l’immersion du lecteur dans l’histoire comme le ferait un film au cinéma. Cette impression est grandement renforcée par un découpage dynamique multipliant les cases proches d’un format 16/9ème, des personnages toujours en mouvement et une tension scénaristique omniprésente jusqu’à la dernière vignette.
Apogée, les Boucles de Celadön pourrait se présenter comme un cycle de Renaissance s’il avait été écrit en premier. Même si il y a quelques références à la série initiale, il n’est nul besoin de l’avoir lue pour l’apprécier et cela pourrait même donner envie de la découvrir à ceux qui ne la connaissent pas. Certes l’histoire n’est pas novatrice, mais son traitement la rend passionnante. Heureusement que des parutions rapprochées sont prévues pour les trois albums car nous avons hâte de découvrir la suite ….
Une chronique écrite par : Xavier
Informations sur l’album :
- Scénariste : Fred Duval
- Dessin et couleur : Emem
- Design : Fred Blanchard
- Editeur : Dargaud
- Pages : 64 pages en couleurs
- Date de sortie : Le 17 janvier 2025