Peintre « maudit » du temps de son vivant, Vincent van Gogh est aujourd’hui adulé et passé à la postérité notamment grâce à Jo van Gogh-Bonger, la femme de Théo, son frère adoré. Des jeunes années du hollandais, celles qui l’ont construit, on ne savait pas grand-chose. Sergio Salma répare cette lacune avec cette biographie retraçant les 27 premières années de vie de l’artiste.
En parcourant les allées du Van Gogh Museum d’Amsterdam, les badauds ont le privilège d’admirer les œuvres prestigieuses de Vincent van Gogh. On s’y balade casque sur les oreilles pour écouter les audioguides, smartphone à la main pour immortaliser d’un selfie son passage dans le musée, et on dépense des euros en produits dérivés afin de ramener quelques souvenirs bienvenus à la maison. Cette notoriété et l’exorbitante valeur de ses toiles auraient étonné le jeune Vincent. Né au printemps 1853, à Zundert, un petit village de l’extrême sud de la Hollande, rien ne le prédestinait à devenir cette icône mondiale de la peinture.
Le futur peintre grandit entre un père pasteur d’une sévère rigueur et une mère aimante qui lui ouvre les yeux sur les beautés de la nature. Cette dernière dessine des aquarelles pour le plaisir. Le jeune van Gogh est plutôt indiscipliné à l’école, la faute à ces enfants de paysans qu’il côtoie en classe, estime son paternel. Pour pallier ce manquement, on lui fait l’école à la maison, puis il est envoyé en internat. Une déchirure pour le jeune garçon qui quitte sa famille et surtout… Théo, son frère adoré.
Dans la tête de Vincent
De la vie de Vincent van Gogh, on connaît surtout ses années de peintre maudit. La littérature ou le cinéma ne s’intéressant, bien souvent, qu’à la dernière partie de sa vie. Pourtant, avant de se lancer dans une carrière d’artiste, Vincent fut employé comme marchand d’art dans une grande compagnie, prédicateur ou encore enseignant. Il fut longtemps porté par la foi et l’envie de soutenir les indigents d’Angleterre, de Belgique ou de Hollande. C’est un pan méconnu de la vie de l’artiste que propose de découvrir Sergio Salma.
Au fil des pages, les lectrices et les lecteurs découvrent la manière dont cet enfant, qui aimait les marches dans les campagnes, cultive sa solitude. L’auteur découpe la vie du peintre en chapitres basés sur les lieux qu’il a fréquentés : de la maison natale, en Hollande, aux galeries d’art de Londres, en passant par Paris ou les mines belges. Vincent, c’est une vie en mouvement, sans concession, transitant d’un pays à un autre, d’un intérêt à l’autre. Marchand d’art ou aspirant pasteur, il cherche sa voie, se passionne, se lasse, oblique sa destinée. Heureusement, son frère Théo est là : c’est un repère précieux, inamovible qui émerge dans le brouillard chaotique qui infuse l’esprit de Vincent.
L’instant décisif
Il est presque troublant d’observer que le style graphique de l’expérimenté Sergio Salma colle parfaitement à la peau de Vincent van Gogh. Un trait nerveux et reconnaissable. Son héros évolue physiquement tout au long du récit jusqu’à devenir ce peintre dont la chevelure rousse est restée dans l’imaginaire collectif. En 144 pages, le dessinateur se fond pleinement dans la biographie du peintre. Ce dernier d’ailleurs ne parle quasiment pas durant l’ensemble du récit. C’est un narrateur qui raconte à la première personne la vie de l’artiste. Mais là suspense, il est impossible d’en dire trop à ce sujet. On a souvent décidé pour Vincent dans sa vie : les études à suivre, les métiers qu’il devait faire, les lieux où habiter. Le cadre narratif joue également ce rôle en escamotant la parole du futur peintre de La nuit étoilée.
En filigrane de la vie du peintre, il y a cette relation unique avec son frère Théo qui est abordée avec une grande sensibilité. Ce lien entre les deux frangins est toujours vivace. Les deux hommes sont enterrés côte à côte dans le petit cimetière d’Auvers-sur-Oise, petit village de l’Oise, en France, où Vincent s’est suicidé.
Grâce à Sergio Salma, on connaît un peu mieux l’histoire de Vincent van Gogh. Comme en photographie, on guette l’instant décisif, celui qui transforme ce jeune homme indiscipliné et perdu en un artiste qui laisse à son décès plus de 2000 toiles et dessins. C’est une lecture qui donne le goût du dessin et de l’art, et qui invite à explorer du regard la beauté du monde.
Une chronique écrite par : Bruce Rennes
Informations sur l’album :
- Scénario : Sergio Salma
- Dessin : Sergio Salma
- Couleur : Amelia Navarro
- Éditeur : Glénat
- Date de sortie : Le 18 juin 2025
- Pagination : 144 pages en couleurs
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