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G.I. Gay

©Dupuis – G.I. Gay. Muñoz, Alcante

En décembre 2010, le président américain Barack Obama abroge la loi « Don’t ask, don’t tell », un texte discriminatoire envers les communautés homosexuelles ou bisexuelles servant dans les forces américaines. Alcante et Muñoz narrent de manière magistrale l’histoire des erreurs prolongées de l’armée américaine dans ce one-shot de la collection Aire Libre.

©Dupuis – G.I. Gay – Muñoz et Alcante

Quelques mois plus tard, le 20 septembre 2011, l’abrogation est appliquée. Ce jour-là, Julie, une journaliste, a rendez-vous avec le docteur Alan Cole, un vieux monsieur vivant à Laguna Beach, en Californie. Devant la caméra de la jeune femme, le médecin raconte le récit de son histoire.  Il débute au moment de l’attaque surprise de Pearl Harbor, en 1941, par les forces japonaises ; un événement qui provoque l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale et bouleverse la vie d’Alan Cole.

Jeune homme à l’époque, le docteur Cole exerçait en tant que psychiatre dans un hôpital de San Diego. Il est fiancé à Sue, fille du Général Covey, un militaire à la retraite mais toujours vindicatif lorsqu’il s’agit de défendre son pays. Il considère l’attaque japonaise comme un affront qu’il convient de laver, et chaque vrai homme doit s’engager à servir son drapeau. Bien qu’exempté en raison de son statut de médecin, le docteur Cole s’enrôle dans l’armée américaine sous la pression de son futur beau-père. Sa première tâche consiste « à chasser » les homosexuels. Ils ne sont pas les bienvenus dans les forces US. Ainsi, le jeune homme s’acquitte d’une tâche ingrate qui va à l’encontre de ses valeurs. Un jour, Merle Gore débarque dans son bureau. Ce jeune homme, plutôt impertinent ne lui cache pas son homosexualité. Et, cette rencontre va complètement bouleverser la vie du psychiatre.

Passions amoureuses cachées dans G.I. Gay

Au scénario, le belge Didier Swysen, dit Alcante, s’intéresse aux dessous peu flatteurs de l’armée américaine. On y découvre l’horreur de la sélection lors du recrutement qui visait à exclure les homosexuels du corps des G.I. Pour parvenir à leurs fins et débusquer les indésirables, les médecins utilisaient toutes sortes de pratiques discriminantes : examen de l’expansion anale, réflexe de régurgitation ou questions personnelles sur leurs relations avec les femmes. Au moindre doute, le tampon « rejected » était apposé sur la feuille d’évaluation du candidat.

©Dupuis – G.I. Gay – Muñoz et Alcante

À l’image d’un documentaire, le récit est précis et instructif. Il emporte les lectrices et les lecteurs dans les différents tourments subis par la communauté homosexuelle. Ceux qui parvenaient à s’engager dans l’armée devaient continuer à mentir ou à se cacher pour nourrir une passion amoureuse.

Une loi qui a des effets pervers

Le récit met à rude épreuve le dessin réaliste de Bernardo Muñoz Serrano. Mais l’espagnol semble à l’aise, quel que soit le rythme imposé par le scénario. On y retrouve des planches denses en nombre de vignettes, avec des dialogues très courts, suggérant ainsi la vitesse des interrogatoires qui se succèdent pour approuver ou rejeter les demandes d’intégration dans l’armée. Puis, il gratifie les lectrices et les lecteurs de pages aérées suggérant le mouvement, la difficulté des entraînements pour devenir G.I. Le récit est une succession de cadrages cinématographiques, avec une mention particulière pour la scène d’exploration d’une île des Samoa américaines. On y entendrait presque les paroles « What a Wonderful World », musique bien connue de Good Morning Vietnam.

©Dupuis – G.I. Gay – Muñoz et Alcante

Lorsque, en 1993, Bill Clinton fit adopter la loi « Don’t ask, don’t tell », sans doute pensait-il servir très sincèrement les intérêts d’une communauté qui était interdite d’armée. Elle était considérée comme un compromis entre un bannissement et la promesse du président de permettre à tous les citoyens de pouvoir servir leur pays, quelle que soit leur orientation sexuelle. Cependant, cette initiative a finalement été une façon de les réduire au silence. Une sorte d’effet pervers d’une loi qui sera donc abrogée par Barack Obama.

La vie d’Alan Cole est une histoire émouvante. Elle traverse les décennies d’une Amérique discriminante, tant dans l’armée que dans la vie quotidienne, lorsqu’il devient impossible de trouver un emploi en raison de son orientation sexuelle. G.I. Gay est une BD passionnante qui mêle subtilement fiction et réalité, pour découvrir un aspect méconnu du fonctionnement de l’armée américaine.

©Dupuis – G.I. Gay – Muñoz et Alcante

Une chronique écrite par : Bruce Rennes

Informations sur l’album :

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